Les intermédiaires qui sont utilisés par Orange sont souvent lents et il y a eu des circonstances où ces intermédiaires ont été accusés par les prestataires d’utiliser leurs fonds, pour faire quelques transactions, en tirer profit, avant de restituer les fonds…

Kodak est une entreprise américaine qui évolue dans le domaine de la photographie. Elle était leader en 1976 et détenait 90 % des ventes de pellicules et 85 % des ventes d’appareils photo. Vous savez ce qui a poussé Kodak à déclarer faillite ? La complaisance. Certains diront que Kodak s’est montrée conservatrice et cela n’est pas faux, mais il ne faut pas oublier qu’elle détenait quand même le premier brevet de caméra numérique en 1976, mais elle ne croyait jamais que les gens allaient abandonner les appareils photo et que les entreprises de téléphonie allaient les intégrer aux téléphones.

Orange est resté le leader incontestable du marché malgré la libéralisation du secteur à cause de sa longue présence dans le marché, de sa notoriété et de son statut d’entreprise cotée en bourse. Cette posture, a-t-elle poussé Orange à penser qu’elle est devenue incontournable ou bien était-ce une erreur de stratégie en interne ?

Quand les nouveaux barèmes des frais de services avaient été publiés par Orange, on a ressenti une grogne de la part des prestataires de services, qui à leur tour, ont décidé unanimement de facturer à leurs clients les frais de service pour les dépôts et retraits. Pendant ce temps, Free, deuxième opérateur mobile du Sénégal menaçait Orange mobile et il fallait innover le plus vite possible pour éviter de perdre des clients.

Orange avait sous-estimé la menace posée par Wave dans le secteur du mobile money. C’est en ce moment que la fintech Wave a surpris Orange avec une offre ultra-compétitive et en guise de riposte. Orange a bloqué la possibilité d’acheter du crédit téléphonique via l’application et il fallait réagir immédiatement, car Orange ne s’est pas préparée conséquemment face à cette menace sous-estimée depuis le début.

Fondée en 2011 par deux Américains, Wave s’est officiellement installée en 2016 à Dakar; son modèle est simple, il s’agit d’appliquer des frais de transaction fixes de 1 % et ne pas répercuter les frais sur les paiements de factures à ses clients, contrairement à Orange, qui facture ces frais à ses clients.

Orange ne doit pas copier Wave aveuglément, mais plutôt prendre le temps de mettre en point une stratégie innovante et payante, car elle a d’autres avantages que Wave n’a pas comme les autres services offerts.

Un autre point plus important qu’ Orange a négligé est la satisfaction des prestataires qui sont les influenceurs directs des clients, vu qu’ Orange n’a pas assez de kiosques pour satisfaire tous ses clients. Les prestataires sont incontournables et leur satisfaction et leur survie sont importantes et doivent être prises en compte par Orange.

Par exemple, si vous êtes prestataire et que vous détenez 250 000 FCFA de fonds de roulement et qu’un client se présente dans votre point pour faire un retrait de 150 000 FCFA via Orange Money, allez-vous donner vos 150 000 FCFA pour une commission faible par rapport à Wave et une difficulté à reprendre vos fonds ou allez-vous juste demander au client d’aller voir votre compétition directe ? On voit qu’il y a deux problèmes à ce niveau : le premier étant le fait que la commission est faible pour les prestataires et que même avec la nouvelle grille, Wave offre des commissions plus compétitives qu’ Orange Money.

Un autre problème est le fait que Wave dispose de boutiques où les prestataires peuvent aller reprendre leurs fonds et qu’avec Wave, il est possible de faire des transactions de plus d’un million avec 250 000 FCFA dans une journée alors que c’est presque impossible avec Orange Money, car il n’y a pas d’accès directs avec les prestataires. Les intermédiaires qui sont utilisés par Orange sont souvent lents et il y a eu des circonstances où ces intermédiaires ont été accusés d’utiliser les fonds des prestataires pour faire quelques transactions, en tirer profit, avant de restituer les fonds.

Dans ce cas, on constate que les prestataires redirigent leurs clients vers l’offre Wave, car étant plus opportun pour les deux parties et en ne faisant pas de retrait Orange money de sommes assez colossales. Quand les prestataires refusent de faire des retraits Orange money, les clients seront plus enclins à utiliser les services de Wave, car ils sont sûrs de pouvoir accéder à leurs fonds. Il est important qu’ Orange sache que le diable se trouve dans les détails et d’essayer de satisfaire les prestataires pour que ces derniers puissent accepter de donner leurs fonds pour les retraits Orange money.

Il ne faut pas non plus oublier les kiosques qui ne disposent pas d’assez de fonds et que par moment, ils sont dans l’obligation d’appeler un intermédiaire pour leur apporter des fonds et le client doit attendre ; ce client risque d’utiliser les services de Wave la prochaine fois. Orange doit revoir toute sa stratégie et essayer de fidéliser ses clients à la limite du possible, car les clients ne sont plus fidèles et ne cherchent que les services les moins chers. Il est aussi important qu’ Orange rectifie les lenteurs et les commissions pour pouvoir gagner cette bataille.

Jadis connue d’utiliser l’effet Veblen ou effet de snobisme qui décrit une conséquence que peut avoir la consommation ostentatoire : le renchérissement des biens est assorti d’une augmentation de la consommation de ceux-ci ». La consommation ostentatoire est définie comme « une consommation destinée soit à montrer un statut social, un mode de vie ou une personnalité, soit à faire croire aux autres que l’on possède ce statut social, mode de vie ou personnalité». Il est très important qu’Orange commence à être perçue comme l’affaire de tous et non d’un groupe privilégié à cause de la cherté de ses prix qui se conjuguent quand même avec la qualité.

Il est utile de rappeler qu’à ce jour, la part d’Orange est de 42, 3 %, la part de l’Etat du Sénégal est de 27,2 %, le personnel de la SONATEL détient 7,3 % et le bloc flottant est de 23,2 %.

Par Mohamed Dia