mIls sont nombreux les responsables de Pastef qui cherchent une base politique et une légitimation de leur proximité aussi avec Sonko. Parmi eux, des visages familiers comme El Malick Ndiaye à Dahra, Aldiouma Sow à Somone ou encore Bassirou Diomaye Faye à Ndiaganiao. Mais leurs éventuels échecs pourraient aussi ralentir leur ascension.

Les élections, c’est aussi, pour les militants des partis politiques, une course à la légitimité. Ces Locales devront être un baromètre de la représentativité de Yewwi askan wi (Yaw), et surtout de Pastef qui fait office de locomotive. Ousmane Sonko doit ce statut à sa 3ème place à l’issue de la dernière Présidentielle. Mais aussi, aux rapports de force avec le pouvoir qui, depuis mars dernier, le confirment « chef de l’opposition », après le ralliement de Idrissa Seck à la majorité présidentielle. Voilà pourquoi même dans cette bataille pour le contrôle des collectivités territoriales, Pastef a plus de candidats que Khalifa Sall ou d’autres alliés au sein de Yaw. Et, il en a profité pour placer ses hommes de confiance, les plus visibles et plus audibles, les icônes de son parti. Entre autres, il y a El Malick Ndiaye, chargé de la communication, Aldiouma Sow, chargé des élections, Bassirou Diomaye Faye, coordonnateur des cadres. Tous sont investis candidats dans une mairie ou dans un département. A leurs risques et périls bien sûr, puisqu’ils sont hors de Dakar. Quand le vent du changement souffle, c’est souvent les grandes villes qui sont agitées. Le monde rural, ce n’est pas une règle, est d’habitude moins rebelle. Voilà pourquoi ces proches de Sonko, en outsiders, pourraient voir d’autres têtes leur tenir… tête.

El Malick Ndiaye veut quelque chose comme Dahra

Il n’est pas la tête de liste majoritaire de la commune, mais de celle départementale. Le chargé de la communication de Pastef croit à son étoile et à son duo avec le candidat de Yewwi askan wi à la mairie de Dahra pour inverser la tendance. « Nous avons investi un inspecteur des impôts, Idrissa Samb comme tête de liste majoritaire à la mairie de Dahra. Il a déjà beaucoup travaillé sur sa candidature depuis 2014 en faisant beaucoup d’œuvres sociales et religieuses. Et puis, Pastef était arrivé 2ème à Dahra, en 2019. Et notre candidat a un mouvement citoyen, dénommé Jolof en marche. C’est un peu comme Aly Ngouille qui est très puissant à Linguère », a-t-il dit. Dahra est d’autant plus important que celui qui remporte la commune a plus de chance pour rafler le département. C’est sous cet angle que El Malick Ndiaye espère « renverser » l’ordre (presque) établi. « C’est comme Touba dans le département de Mbacké. C’est plus de 50% des électeurs que la commune de Linguère », analyse-t-il. Le candidat de Yaw à la présidence du Conseil départemental de Linguère se veut optimiste, mais reconnaît aussi la force du maire Bby de Linguère. « En tout cas, nous avons beaucoup travaillé dans la commune de Dahra. Même si, pour être réaliste, Aly Ngouille est très bien implanté dans sa commune. »

Il est évidemment risqué de défier un ministre aussi balèze de par son département aussi social que Samba Ndiobène Ka. Mais El Malick Ndiaye, comme d’autres candidats de Yaw, espère surfer sur la popularité de leur leader. Parce que son projet de « Jolof bi nu bëgg ! » ne suffira pas pour faire face à ses adversaires. « On n’a pas peut-être les moyens financiers mais on a quand même cette notoriété au niveau national. D’ailleurs, la tendance générale, c’est que la jeunesse est avec Pastef. Nous faisons beaucoup de porte-à-porte aussi et de communication auprès des leaders d’opinion », dit-il.

Aldiouma pour le grand « Sow » dans l’inconnu

Il est le « Monsieur Elections » de Pastef. Jeune aussi, mais bien au fait des textes. Aldiouma Sow est investi candidat de Yewwi askan wi à Somone pour défier un politicien aguerri. Le maire sortant, Boucar Sadji, a été élu sous la bannière du Pds en 2014, avant de rejoindre l’Apr. Il n’a pas eu de résistance au sein de Benno bokk yaakaar lorsqu’il s’est agi de choisir un candidat. C’est là aussi, pour ce responsable de Pastef, un gros défi. S’il a très tôt investi le terrain en misant sur la jeunesse, Sow doit faire mieux. Mais il fait confiance à ses « compétences » par rapport aux « 5 candidats en lice dont le maire sortant ». Il souligne : « J’ai le niveau académique le plus élevé. Contrairement aux autres, j’ai fait des études en décentralisation et gestion des projets de développement local. J’ai la chance de n’avoir jamais été conseiller. » N’est-ce pas un manque d’expérience ? Pour lui, c’est qu’au moins il n’a pas « de compte à rendre ». A l’image des autres candidats de Yaw, et surtout membres de Pastef, il compte sur « un socle électoral » qui a placé Sonko deuxième à l’issue de l’élection présidentielle passée, sans compter l’alliance avec Taxawu Senegaal et le Pur. Aldiouma Sow admet ses « faiblesses » avec « Les réalités sociologiques de la zone qui voudraient que seuls les lébou dirigent la commune » et le « manque de moyens logistiques et financiers ». Le 26 décembre, sur sa page Facebook, il s’adressait « Aux Somonois et Sénégalais » en ces termes : « Notre élection n’est pas la finalité de notre combat. Elle n’est qu’un simple moyen juridique (une exigence procédurale) pour réaliser notre projet pour la Somone. »

Dans la peau du « candidat de l’unité et du changement », il est convaincu que « c’est possible, cette fois-ci ». Parce que justement une éventuelle défaite ralentirait son ascension. Mais il mesure le risque. « Évidemment une victoire va conforter mon encrage dans l’appareil central du Parti et renforcer ma crédibilité auprès du leader, des militants et des sympathisants du Parti », dit-il. Mais Aldiouma Sow admet aussi : « Une défaite va certainement questionner ma légitimité à continuer à occuper la place que j’occupe actuellement au sein des instances nationales. Mais ça ne me pose aucun problème de quitter une échelle supérieure de responsabilité pour atterrir à une échelle inférieure. Le plus important pour moi, c’est que la ligne initiale du Parti continue d’être suivie et respectée par tous. Autrement dit, je suis conscient que le lendemain de ces élections va créer un nouveau tournant dans ma carrière politique. Mais je reste néanmoins préparé à tous les scénarios possibles. »

Bassirou Diomaye Faye, le « bleu » à Ndiaganiao

Il est moins visible. Mais il travaille « en silence », confie un de ses camarades de parti. Le coordonnateur du Mouvement national des cadres patriotes (Moncap) est le candidat de Yaw à la mairie de Ndiaganiao. Il y va avec les composantes de la coalition et une frange du Pds. Cette candidature est, pour lui, comme il le disait dans une lettre, une « lourde responsabilité ». Bassirou Diomaye Faye souhaite une « alternative profitable à la population de Ndiaganiao ». Il est vrai que Benno bokk yaakaar s’est fissurée dans cette commune après le choix porté sur Tening Sène au détriment du maire sortant, Gana Gningue, qui, avec des socialistes, a décidé de défendre son bilan. Et sous ce rapport, le candidat de Yaw pourrait en profiter. Mieux, Bassirou Diomaye Faye, une des figures phares de Pastef, espère, même s’il ne le dit pas, récolter les fruits de son soutien aux populations de Ndengler, un village de la commune de Ndiaganiao, dans leur combat les opposant à Babacar Ngom. Mais cet argument pourrait-il faire pencher la balance de son côté ? Rien n’est sûr. Une victoire de Yaw à Ndiaganiao devrait faire de ce responsable de Pastef un des hommes qui compteront d’ici 2024. Et même après. Cela est d’ailleurs valable pour les autres pointes comme Birame Souleye Diop. L’administrateur de Pastef devra se défaire, à Thiès nord, du candidat de Wallu Senegaal, Sidy Ndiéguène. Ce dernier, pourrait profiter de l’aura de sa famille très représentative dans la ville. Il a en face de lui aussi le candidat de Benno bokk yaakaar, le rewmiste et maire sortant, Lamine Diallo.

 

Par Hamath KANE

8 janvier 2022

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