Diomaye accepte pour Atépa ce que Diouf, Wade et Macky avaient refusé
L’homme d’affaires, Pierre Goudiaby Atepa, a annoncé le dimanche 28 avril 2024, une décision du Président Bassirou Diomaye Faye, de suspendre tous les chantiers privés en cours d’exécution sur la Corniche de Dakar.
A quel titre Atépa annonce-t-il, à la place du gouvernement et des autorités compétentes, d’aussi importantes mesures, dans son propre secteur d’activités où il a des concurrents et sans doute quelques petits comptes à régler ? La dame Aby Ndour peut davantage craindre pour son petit business sur la Corniche !
N’aurait-il pas été plus décent de laisser le soin à un officiel de faire une telle annonce ! Quid des constructions qui ont fini d’être réalisées et dont certaines l’ont été avec l’implication directe de Pierre Goudiaby Atépa ? Ne faudrait-il pas les détruire pour être justes et équitables ?
Voilà un parfait signal dissuasif pour tous les investisseurs qui détiennent des titres de propriété irrévocables et qui ont levé des financements auprès des banques et/ou ont recueilli l’argent d’acheteurs, qui attendent le respect des délais de livraison convenus !
Au cas où l’Etat du Sénégal se risquerait à dédommager les victimes, que le budget national ne suffirait pas pour cela ! A titre d’exemple, l’Etat avait été obligé, en dépit des protestations du Président Macky Sall, de payer un terrain de 6000 m², au prix de 9 milliards de francs, pour y ériger l’usine de dessalement d’eau de mer sur le flanc du Phare de Dakar ! Cela peut donner une idée du coût de dédommagements sur plusieurs kilomètres carrés de superficie de terrain !
Le Directeur général des impôts et domaines (Dgid), Abdoulaye Diagne, a publié un avis indiquant les zones ciblées par la mesure de suspension des travaux. Soit dit en passant, que je ne possède aucun chantier en cours dans les secteurs ciblés. On constate, à la lecture du document, qu’il y transparaît une certaine indignation sélective.
En effet, pourquoi sévir seulement sur les affectations foncières postérieures à l’année 2020 ? Il aurait été plus exhaustif de passer au peigne fin toutes les affectations foncières sous le régime de Macky Sall et même d’Abdoulaye Wade.
Ainsi, on saurait le rôle joué par les uns et les autres comme par exemple, celui de Pierre Goudiaby Atépa, dans la première opération de morcellement des terres de l’aéroport Léopold Sédar Senghor ou du terrain jouxtant l’hôtel Terrou Bi de Dakar et abritant partiellement, le nouvel hôtel Azalai ou encore les affectations dont avaient pu bénéficier des cadres du parti Pastef et du syndicat des agents des impôts et domaines ? Quel est l’impact économique et social de l’arrêt des chantiers ?
Ce sont des dizaines de milliers d’ouvriers et de techniciens du bâtiment qui gagnent leur vie en passant leurs journées dans ces chantiers. Qui va leur assurer des revenus ? On prendra également en compte les nombreuses personnes qui leur vendent à manger ou des boissons aux heures de travail. Et les familles qui dépendent du revenu journalier ramené par ces ouvriers ? Et les autres commerces et activités de production, de vente de ciment et de matériaux de construction et les activités des cabinets de notaires ?
L’adage dit bien que «quand le bâtiment va, tout va». En arrivant au pouvoir en 2012, Macky Sall avait agi de même que le tandem Bassirou Diomaye Faye et Ousmane Sonko, en bloquant des chantiers du lotissement de l’aéroport Léopold Sédar Senghor avec les cités Mbackiou Faye et Cheikh Amar, entre autres. L’évaluation faite par les services du ministère des Finances, indiquait que plus de dix mille travailleurs gagnaient leur vie dans ces chantiers, à raison d’une dizaine d’ouvriers par villa.
En septembre 2013, le gouvernement a laissé les chantiers se poursuivre pour ne pas faire souffrir davantage l’économie du pays. Par ailleurs, au-delà de l’impact négatif que cela provoquera sur l’environnement des affaires et la cote du Sénégal au «Doing business», il y aurait fort à craindre qu’avec cette opération, le gouvernement fasse des milliers de victimes innocentes qui ont acquis des terrains par le circuit le plus légal. On peut bien s’imaginer que les pontes qui bénéficieraient d’affectations foncières, les mettent immédiatement sur le marché.
Dans sa note, le Dgid ouvre une brèche pour envisager l’examen des situations au cas par cas, par un Comité ad hoc dont la domiciliation ou la composition n’est pas encore précisée. Reviendra-t-il au Premier ministre de s’occuper des discussions ou autres négociations, au cas par cas ?
Je suis volontaire pour être le premier client d’une enquête sur le foncier.
L’occasion est donnée pour clarifier toutes les accusations portées, çà et là, contre des citoyens. Je n’ai eu de cesse de dire, sur tous les plateaux de radio et de télévision, et sur tous les tons, que je n’ai jamais bénéficié d’une affectation d’un seul mètre carré de foncier de la part de l’Etat. Tout patrimoine que j’ai pu acquérir dans ce secteur, l’a été par le truchement d’une transaction foncière stricte, avec des personnes privées et selon les procédures claires et transparentes et tous les droits et taxes ont été dûment acquittés.
Le nouveau gouvernement dispose de tous les leviers pour en avoir le cœur net, d’autant qu’un responsable du parti Pastef, Abdou Gning, vient d’être nommé à la tête du service des Domaines. Dans un texte du 22 novembre 2022, publié dans ces colonnes et intitulé :
: «Je ne cède pas au chantage au smartphone», j’indiquais «qu’on a immanquablement des amis et des ennemis. Des amis pour nous apprendre notre devoir, des ennemis pour nous obliger à le faire»
J’espère fortement qu’une enquête exhaustive sera ouverte sur le foncier et ce sera une opportunité pour faire la lumière et faire taire des accusations fallacieuses et gratuites qui alimentent quelques causeries. On peut se consoler et rendre grâce à Dieu de faire partie des propriétaires et non pas de cette foule hystérique de délateurs, «livers» et autres promeneurs avec le smartphone à la main, qui prétendent dénoncer on ne sait quel scandale. On devra d’ailleurs nous dire si la propriété privée licite, pour un Sénégalais de surcroît, qui n’a jamais géré des fonds publics, n’a jamais occupé d’emplois publics ou n’a jamais bénéficié d’un contrat avec l’Etat, est prohibée dans ce Sénégal de Ousmane Sonko et de Bassirou Diomaye Faye !
Dominique Strauss Kahn, excédé par des reproches ou des quolibets de ses «amis» de la gauche sur sa richesse, avait pu dire un jour : «Devrait-on s’excuser d’être quelque peu riche ?». Encore une fois, personnellement, je suis totalement à l’aise sur ce sujet et cela m’avait permis de m’insurger contre les prédations foncières, avec un article retentissant titré «Finalement, ils ont fait pire que les Wade avec nos terres», en date du 8 juin 2020.
Aussi, j’évoque très largement et on ne peut plus librement le sujet? dans mon livre «Macky Sall, derrière le masque», publié en septembre 2023. Certains partisans du Président Sall, courroucés, avaient espéré en vain pouvoir me confondre avec des attributions foncières.
Mal leur en a pris ! Mon audition que je souhaite tant, devant une structure d’enquête sur les questions foncières, sera le lieu, documents à l’appui, de montrer que depuis que je commençais à construire des maisons et des immeubles ou que j’achetais des terrains, en 1998 (cela fait 26 ans déjà, certains lanceurs d’alerte n’étaient pas encore nés !), Abdoulaye Wade était encore opposant, que Macky Sall était chef de division à la société Petrosen ou que Ousmane Sonko et Bassirou Diomaye Faye étaient étudiants à l’université de Saint-Louis et à l’université de Dakar.
Mon audition comme celles de nombreux autres Sénégalais, permettront de fournir des preuves sur des attributions et autres transactions foncières, impliquant de hauts responsables du parti Pastef et portant sur des terrains dont ils ont pu bénéficier, au gré de multiples opérations de morcellement.
En effet, cela permettrait également de débusquer des patrimoines fonciers opportunément occultés dans certaines déclarations de patrimoine. Et, croyez-moi, le parjure ne sera pas loin ! Il y a généralement des sujets qu’il vaudrait mieux ne pas soulever si on veut sauvegarder l’image de certaines hautes personnalités de l’Etat.
Par Madiambal Diagne – mdiagne@lequotidien.sn