Les premières connexions à internet n’étaient pas destinées au grand public. D’ailleurs, elles ne passaient même pas par Sonatel. En effet, tout au début, pour une amélioration de la communication entre ses laboratoires et faciliter la connexion entre ses chercheurs et le monde scientifique, c’est Orstom, devenu plus tard l’Institut de Recherche pour le développement (IRD), qui entre en scène avec notamment un système de messagerie électronique.

Mais l’accès à internet du grand public intervient dans un moment charnière du développement technologique au Sénégal, avec des initiatives diverses notées de part et d’autre.

Pour mieux comprendre cette sortie du leader du parti Rewmi qui relatait  l’arrivée d’Internet au Sénégal et du rôle prépondérant qu’il aurait joué, Dakaractu s’est intéressé à l’historique de l’internet au Sénégal. Pour ce faire, la version révisée d’un document conçu par les chercheurs que sont Olivier Sagna, maître de conférences à l’école des bibliothécaires, archivistes et documentalistes de l’université Cheikh Anta Diop de Dakar, Christophe Brun, directeur des systèmes d’information du « Snecma Services Brussels » et responsable informatique de l’IRD Sénégal et Steven Huter, administrateur de programme au « Network Startup Resource Center » (NSRC), a été interrogée. Ce résumé qui est également une étude de cas intitulé « Historique de l’internet au Sénégal (1989-2004) » donne une idée de l’expansion de ce réseau informatique au Sénégal et les contours de « ses facilitateurs ».

Il fallait donc, revisiter les propos d’Idrissa Seck et tenter de comprendre leur fondement au regard de l’aspect métaphorique voire philosophique qu’ils revêtent. Aussi, avec la tournure prise sur les réseaux sociaux poussant même les « moins initiés » à s’épancher sur un sujet dont ils ignorent les tenants et les aboutissants, il fallait interroger l’histoire technologique au Sénégal.

«En s’exprimant sur Facebook, la connexion qui te permet d’échanger avec les autres, est suivie par les forces de sécurité qui peuvent te trouver n’importe où. C’est ce qu’on appelle « WIFI ». C’est moi qui ai amené internet au Sénégal. Si vous parvenez à vous connecter, c’est grâce à moi. Si vous mangez du riz parfumé, c’est Idrissa Seck », déclarait Ndamal Kadior lors de sa conférence de presse à Thiès où il dénonçait les agissements de certains jeunes sur internet. C’est cette parenthèse de l’ancien Premier ministre qu’il faudra alors « tenter » d’expliquer. Il faut d’abord rappeler que le leader du parti Rewmi a été, de 1995 à 1998, ministre du commerce, de l’artisanat et de l’industrialisation dans le gouvernement d’union nationale de l’ancien Premier ministre Habib Thiam. Cependant, même s’il y avait un ministre de la recherche scientifique et des technologies à l’époque qui était Marie Louise Corréa également du Pds, Idrissa Seck s’est donné plaisir en faisant des démarches pour faciliter l’accès à internet au grand public,  car il faut le rappeler, de 1989 à 1995, internet reste l’affaire de quelques privilégiés opérant principalement dans des institutions de recherche et d’enseignement supérieur, des ONG et quelques démembrements de l’État. Et en cette période, la Sonatel ne faisait pas l’effort nécessaire pour élargir l’assiette de distribution Internet. Plusieurs facteurs vont en effet, d’après cette étude de cas de 73 pages, contribuer à modifier l’attitude de la Sonatel. Il y aura tout d’abord, l’explosion de l’Internet dans les pays du Nord, qui propulse le réseau sur le devant de la scène médiatique.

 

Comme l’expose le document parcouru sur « l’histoire de Internet au Sénégal », c’est  en 1995 qu’intervient le changement. Lors d’une visite de travail à Washington, Idrissa Seck a assisté à des démonstrations Internet et mesurant l’impact de cette technologie et de son importance pour le Sénégal, s’est automatiquement dit qu’il faut « connecter le Sénégal au réseau Internet ». À son retour, il convoque les responsables de la Sonatel (dirigée à l’époque par Cheikh Tidiane Mbaye) pour leur demander d’agir dans ce sens. En mai de la même année, à l’occasion du 3e sommet Africain-Américain qui se tenait à Dakar, une étape majeure est franchie. Un coup médiatique qui se révèlera être également un coup de poker gagnant, en demandant à la société Omnes Cable and Wireless de connecter le Sénégal à Internet pendant la durée du sommet. Ainsi, un lien « VSAT de 64 Kbps » est installé pour la circonstance au Centre international du commerce extérieur du Sénégal (CICES) et pendant près d’une semaine, responsables politiques et économiques et simples visiteurs assistent à ce que l’on peut considérer comme étant la première démonstration publique d’internet au Sénégal.

 

L’événement est fortement médiatisé et les démonstrations enthousiasment tous ceux qui y assistent. Devant le succès de l’opération et sous la pression des autorités officielles, la Sonatel annonce finalement son intention de connecter le pays à Internet dans les mois qui suivent. Le cahier de charges a été rédigé pour la mise en place du point d’accès Internet dès le mois d’avril, et l’appel d’offres en juillet, lancé.  Le président d’alors, Abdou Diouf lors de son message de fin d’année en 1995, avait annoncé que le Sénégal sera connecté dès le début de l’année. L’effectivité s’ensuit en mars 1996. Au regard de ce qui précède, même si internet était l’affaire d’une minorité, son expansion au Sénégal a vu la participation considérable de l’ancien premier ministre du Sénégal, Idrissa Seck.

Source dakaractu