L’actuel Khalife communément appelé Borom Darou Khoudoss, Serigne Ahmadou Moukhtar Mbacké, détenteur du Khalifat de Serigne Modou Moustapha, demeure de l’avis de tout le monde, un religieux qui s’acquitte à mer- veille de sa mission. Votre canard préféré ouvre aujour- d’hui une page de l’histoire de cette contrée de Touba en faisant le portrait de l’actuel Khalife de Darou Khoudoss qui renvoie au 1er Khalife de Cheikh Ahmadou Bamba.
Mouhamadou Moustapha Mbacké, le premier khalife de Serigne Touba.
Lorsque, de guerre lasse, au terme d’un exil pénible et inique en Afrique Centrale, le Pouvoir Colonial se résolut à ramener Cheikh Ahmadou Bamba au Sénégal, il se trouva placé devant un constat d’échec quant à sa tentative de liquidation du Cheikh et de ses idées. Mais il ne désarma pas pour autant : le combat fut transposé sur le plan culturel. Sa nouvelle stratégie fut d’entreprendre d’effacer de la mémoire du peuple, jusqu’au souvenir de Cheikh Ahmadou Bamba par le biais de la scolari- sation d’enfants dont on allait planifier savamment le lavage du cerveau, le déracinement cul- turel et l’européanisation par l’assimilation aux mœurs occi- dentales. Selon les espérances du Pouvoir Colonial, le Mouridisme devait s’effondrer de lui-même dès la disparition de son fondateur, miné par les dissensions qui naîtront forcément, croit-il, des querelles successorales, mais aussi par les séductions de la vie matérielle qu’il offre.
Tous ces espoirs devaient par la suite s’écrouler lamentablement car Cheikh Ahmadou Bamba al- lait laisser une descendance de Vaillants Paladins de l’Islam qui se sont tous illustrés dans la défense et la propagation de l’œuvre du fondateur du Mouridisme.
Courage incommensurable
Le premier d’entre eux, Cheikh Mouhammadou Moustapha Mbacké se distingue par un courage incommensurable, une intelligence hors du commun, d’immenses qualités de rassembleur, d’organisateur, de bâtis- seur, toutes choses qui ont trouvé la pleine mesure de leur expression dans le contexte particulièrement dur de l’époque coloniale, dans l’une de ses périodes les plus tragiques : l’entre deux guerres.
Ce preux Chevalier de l’Islam qui allait reprendre et porter haut le flambeau allumé par son illustre Père, a vu le jour en 1888 à Darou Salam, d’une mère elle- même issue d’une grande famille d’érudits, Sokhna Ami- nata LÔ. C’est d’ailleurs son oncle maternel, Serigne Ndame Abdou Rahmane Lô, grand compagnon de son Père, qui al- lait se charger de son initiation au Coran, tandis que Mame Thierno Birahim Mbacké, frère cadet du Cheikh, allait assurer à son tour sa formation dans les questions théologiques. Par la suite, son père, le Cheikh en per- sonne, se chargera de guider ses pas dans les arcanes de la for- mation mystique. Jamais étudiant ne fut aussi doué. Il excellera à un point tel que son père le désignera comme successeur avec pour mission, le raffer- missement de la cohésion de la Communauté Mouride dans le but de la faire prospérer, mais surtout l’édification de la Grande Mosquée, pour la seule gloire de Dieu. Il n’est peut-être
Pur produit du Daara, le khalife de Darou Khoudoss est né en 1939 à Touba. Serigne Ahmadou Moukhtar Mbacké a débuté ses humanités coraniques à Darou Rahman, à sept kilomètres de la ville sainte. Après sa mémorisation du Coran, Et Baye Cheikh Seye Imam sous la supervision de son grand-frère Gaïndé Fatma, il embrassa les études arabes et autres connaissances ésotériques de l’Islam. Son goût du savoir et des connaissances va l’amener à faire des périples à travers le monde.
Etudes supérieures en Mauritanie et en Egypte
Après ses études au Sénégal, Serigne Ahmadou Moukhtar se rendra d’abord en Mauritanie, précisément à Medjerda, ensuite en Egypte où il a entamé ses études supérieures. Il passa deux brillantes années à l’université du Caire, avant de les poursuivre au Maroc à l’Université Mohamed V de Rabat. Il en sortira avec une licence en Sciences Humaines avec une spécialisation en histoire.
Carrière diplomatique exaltante
Ses études supérieures accomplies, le Khalife de Darou Khoudoss va embrasser une carrière diplomatique exaltante. Ce qui allait raffermir ses prédispositions à accueillir avec courtoisie et simplicité ses semblables, à faire montre d’un élan humain extraordi- naire à l’endroit de ses hôtes. Autant de raisons qui ont fait que, son domicile est devenu le lieu de rencontres idéal, où toutes les familles de Touba se sentent chez elles. Cheikh Ah- madou Moukhtar, par la grâce d’Allah, a accédé au khalifat de Darou Khoudoss le 13 juin 2004, suite à la disparition de Serigne Khadim Mbacké Moustapha. Il se résolut à porter, dans la continuité, les projets et ambitions de son prédécesseur, d’abord sous la bénédiction de Serigne Saliou Mbacké et ensuite celle de Mouhamadou Lamine Bara Mbacké, actuel Khalife Général des Mourides.
Solidarité agissante du Khalife
Parmi ces énormes chantiers, on peut citer le renforcement des liens fraternels entre toutes les familles de son père Cheikh Modou Moustapha et de son oncle paternel Cheikh Mouhamadou Lamine Mbacke. Autre preuve élo- quente à ce propos, le khalife a décidé de cultiver la solidarité
entre Darou Khoudoss et Gouye Mbind dont le détenteur de la charge du khalifat est Cheikh Maty Lèye Mbacké, Frère cadet de Cheikh Mouhamadou Moustapha. Les resserrements des liens de sang auxquels Serigne Ahmadou Moukhtar at- tache un prix fort ont reçu un écho favorable dans cette famille, surtout en la personne de Cheikh Maty Lèye, son cousin et aîné Dans sa vision de rassembleur, il a fédéré toute une force sociale éclatée et sol- idaire, au sein des dahiras de Darou Khoudoss. Ainsi, il a cristallisé toute cette énergie so- ciale dans un cadre attractif et dévoué appelé l’Union des Dahi- ras de Darou Khoudoss. Aujour- d’hui, chaque famille de Darou Khoudoss garde une réelle au- tonomie sur ses talibés, mais agissent ensemble sous son au- torité, autour du Diwanou Mouridina, lors des grands évènements. Serigne Mouhamadou Moukhtar est loin d’être prisonnier de l’histoire. Quand cela s’avère nécessaire, il procède à des innovations por- teuses de la volonté de toute la communauté de Darou Khou- doss et de la famille mouride. Les résidences de Khadimou Rassoul à Touba et Diourbel, la mosquée de Baïty, où fût scellé le Pacte de L’exil de Borom Touba, sont des exemples illus- tratifs. La vision de solidarité et d’unité développée par le khalife de Darou Khoudoss s’avère payante, car aux travaux de Khelcom, de l’année dernière, le périmètre dévolu à Darou Khoudoss a été récolté en trois jours, au lieu de la semaine que pre- naient précédemment les travaux. Agriculteur hors pair, il est de ces guides religieux qui portent, aujourd’hui, le legs de Serigne Saliou Mbacké en menant d’intenses activités agro industrielles. Une agricul- ture intégrée passant de la récolte à la transformation, l’embouche bovine est en train d’être développées par Ahmadou Moukhtar Mbacké dans ses champs-daaras à Keur Cab, Bané (Colobane) et Bène, et Darou Salam Département de Koupentoum Région de Tamba Counda à l’intérieur du pays.
Retour sur une vie de grâces de Cheikh Ahmadou Bamba
La communauté mouride a re- visité l’œuvre du premier Khalife de la Mouridiyya Serigne Mouhamadou Moustapha Mbacké. Ce jeudi 19 septembre 2019, il a été, en effet, commé- moré le 93ème anniversaire du rappel à Dieu de Cheikh Ahmadou Bamba à Darou Khoudoss. Cet événement a été organisé pour la première fois en 1935 par Serigne Modou Moustapha pas superflu de dire que les contemporains ont rapporté que son Père lui témoignait une réelle affection car on avait le sentiment qu’il savait qu’il avait bien investi sa confiance.
Défiance à l’égard du pouvoir colonial
La première occasion que Cheikh Mouhammadou Moustapha Mbacké eut de montrer qu’il était à la hauteur des espérances de son Père, ce fut en 1927, lorsque le Cheikh disparut. La rapidité et la pertinence de sa réaction, le sang froid, la discrétion et le courage avec lesquels il fit transférer l’il- lustre corps à Touba, dans le contexte très coercitif de la péri- ode coloniale forcent encore, de nos jours, l’admiration, quand on sait qu’il n’était pas facile à l’époque de braver le Pouvoir Blanc (il a donné une sépulture à son père sans informer l’Ad- ministration, en se passant surtout de son autorisation) et d’encourir les foudres de son courroux. Au mépris des risques patents, il a exécuté les dernières volontés de son père : lui assurer une sépulture en tout conforme à ses vœux, selon la procédure qu’il avait lui-même indiquée, surtout en s’assurant que son corps ne soit point souillé, ne serait – ce que par le simple regard d’un membre de l’administration coloniale.
Une autre manifestation de sa pleine capacité à jouer le rôle que son père lui a dévolu a été la manière dont il a mis fin aux velléités de dissidence de cer- tains Grands Cheikhs après la disparition du Fondateur. Par son aura personnelle, et ses qualités de grand rassembleur, il a réussi à rallier autour de sa personne tous les dignitaires et les talibés. Pour assurer la cohé- sion et la force de la Commu- nauté, il a, avec intelligence, choisi la voie du dialogue et de la concertation. La plus grande réussite à mettre à l’actif de Cheikh Mouhammadou Moustapha est, sans conteste, la construction de la Grande Mosquée de Touba. C’était un projet tellement cher à Cheikh Ahmadou Bamba qu’il en dira lui-même, bien avant sa con- struction, « L’Eternel m’a honoré pour l’éternité d’un édifice inde- structible qui se dressera jusqu’au Paradis ».
Lorsque, le vendredi 17 dhul – qi da 1530 H (4 Mars1932), il procédait à la pose de la pre- mière pierre de l’édifice en
présence des Dignitaires du Mouridisme et d’une foule de Talibés enthousiastes, que d’obstacles il avait du abattre pour en arriver à ce jour et à ses fastes.
En outre, il a eu à déjouer les manœuvres frauduleuses d’un certain Pierre Taiilerie, Administrateur Colonial ayant revêtu le manteau d’en- trepreneur pour se faire ad- juger le contrat de construction de la Grande Mosquée. Très vite, il est ap- paru qu’on avait affaire avec un escroc qui croyait pouvoir s’enrichir sans risque en mis- ant sur l’ignorance du droit de ses victimes et surtout sur la peur qu’elle devrait normalement avoir de traîner un blanc devant les juridictions, aussi bien coloniales que métropolitaines.
Par sa détermination Cheikh Mouhammadou Moustapha obtint la condamnation de Taiilerie. Les travaux de la Grande Mosquée reprirent de plus belle et les Talibés con- tinuèrent de rivaliser d’ardeur et de sacrifice pour la réussite de l’entreprise.
Inauguration de la Grande Mosquée de Touba
Le Vendredi 7 Juin 1963, jour de l’inauguration de la Grande Mosquée par Cheikh Mouhammadou Falilou le digne successeur de Cheikh Mouhammadou Moustapha, tous les cœurs, à l’unanimité, se sont souvenus, avec émotion, du premier Khalife de Khadimou Rassoul, disparu le 13 Juillet 1945, alors que l’édifice avait déjà pris forme : les fondations en étaient achevées et les murs avaient atteint la hauteur d’une ter- rasse. L’image d’un tra- vailleur infatigable, d’un érudit possédant à la perfection les Sciences Coraniques et la langue arabe planait sur l’assistance.
L’on gardait encore en mé- moire la célébration du Premier Magal après Serigne Touba dès 1928 (dans le sil- lage du Fondateur qui l’or- ganisait lui-même), point de départ d’une tradition solide- ment établie de nos jours et qui est devenu l’un des événe- ments les plus importants du monde musulman.
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