CAPACITÉ DES MOURIDES à LEVER DES FONDS

la civilisation musulmane en général et celle mouride en particulier, disposent de mécanismes latents ou manifestes et de mœurs économiques capables de montrer l’alternative : « touba Ca Kanam » en est une. Cette structure mobilise des fonds pour réaliser des œuvres grandioses à la gloire de Cheikh ahmadou bamba avec la bénédiction
du Khalife général. tous les contributeurs semblent acquis à la conviction que l’argent amassé arrivera à bon port. un exemple à copier par nos décideurs.

L’économie boursière est un véritable château de cartes : son affaissement est toujours brutal et sans possibilité de sauvetage parce qu’elle est abstraite, voire illusoire. Les
bricolages successifs qui ont donné l’illusion de sauver l’économie occidentale en
déroute ne sont, sous ce rapport, que des colmatages destinés à différer l’échec ou à calfeutrer l’aporie. La seule issue viable et porteuse de lendemains meilleurs est un
retour sans délai à l’économie réelle en faisant du travail la source et la locomotive du développement économique. Un tel retour consistera à revaloriser le travail et à en faire le levier principal qui assure le rythme de la société. C’est précisément à un tel retour qu’opère le Mouridisme : les rapports sociaux qui structurent cette communauté, la hiérarchie religieuse qui la régule, la formation spirituelle et la pratique qui en découle, sont tous fondés sur le travail et la solidarité agissante.
« touba ca Kanam »était au début un groupeWhatsapp « Touba ça Kanam » est une organisation créée sur initiative de Fallou Ndiaye. D’après Fallou Guèye, membre du mouvement, l’objectif de départ était de collecter 24 milliards chaque année avec une contribution de 12 000 F Cfa versée par 2 millions de talibés. Fallou Ndiaye avait d’abord créé un groupe Whatsapp de discussion surle développement de Touba.
Mais l’adhésion massive desdisciples a poussé l’initiateurà transformer le groupe de
réflexion en « dahira », avecla bénédiction du khalife
général des mourides del’époque, Serigne Sidy Moctar. « Touba ça Kanam » a effectué un travail important dans la réalisation des projets entrepris à Touba par l’actuel khalife général des mourides, Serigne Mountakha Mbacké.
Fallou Ndiaye et ses camarades ont contribué à hauteur de 150 000 000 F Cfa dans
l’organisation du grand Magal de 2019, notamment
50 000 000 F Cfa dans la distribution de l’eau, 50 000 000 F Cfa dans l’éclairage
public et 50 000 000 F Cfa dans l’assainissement pour sortir certains quartiers des inondations. L’association a aussi investi dans le volet social, avec la construction de
quatre postes de santé, l’achat de deux ambulances, la distribution de denrées et de vêtements aux populations démunies pendant les fêtes religieuses (Korité, Tabaski, Magal, Gamou, Tamkharite, etc.). Le jour où toutes les études scientifiques requises permettront de formuler des théories générales sur la capacité de la communauté mouride à lever des fonds, on comprendra davantage qu’il n’est d’ailleurs pas exagéré de croire à une science économique empirique ou immanente dans les modes de productions, les rapports
sociaux et la consommation, propres à la communauté mouride. Nous n’avons pas,
en Afrique la tradition de penser nos modes de vie et nos modes de consommation afin d’en extraire, de façon scientifique les principes et les lois immanentes. Pourtant, toute activité humaine obéit à des mécanismes certes pas aussi prévisibles et nécessaires que les
phénomènes naturels, mais pouvant faire l’objet de généralisations et de modélisation. Il ne serait pas absurde d’engager, sous ce rapport des recherches scientifiques pour mettre en exergue les « lois » qui gouvernent l’économie mouride parce qu’il en existe. Il se pourrait très bien que ce que nous allions tous les jours chercher ailleurs soit
largement disponible chez nous. Il nous faut absolument des principes et des lois
économiques adaptés à nos réalités sociales et surtout à nos croyances. Assurément,les intellectuels sénégalais n’ont pas encore pleinement tiré profit de toutes les potentialités économiques, politiques, sociologiques et psychologiques que le Mouridisme propose à l’humanité. « Touba ca Kanam » mobilise les « adiya » ( contribution financière) des talibés pour les réinjecter dans des programmes gigantesques. La force de cette
structure est qu’elle surfe sur les vagues de la transparence et de la bonne gouvernance. Les comptes sont révélés et la source des financements connue au détail. C’est ce qui fait
que les talibés se bousculent pour faire œuvre utile avec la certitude que leur participation ne sera pas détournée.
Le « Adiya » est le soubassement de la puissance financière mouride. puissance financière desmourides : à l’origine était le « adiya »
‘’Ne sois jamais avare des biens éphémères de ce bas monde, car tu t’exposeras de
la sorte des déshonneurs dans l’au-delà’’, recommandait Cheikh Ahmadou
Bamba à ses disciples. Dans son célèbre poème panégyrique ‘’Nahju-Qadaa îl
Hadj’’ (La voie de la satisfaction des besoins), le fondateur du Mouridisme, Cheikh
Ahmadou Bamba Mbacké, incite d’abord le fidèle mouride à se départir du bien
matériel. Mais aussi à se consacrer à l’édification des biens communs à travers la
participation de tout un chacun.
Dans cette forme d’organisation, le ‘’adya’’ y joue un rôle central. Il symbolise pour la
communauté mouride ce que sont les partenaires financiers de l’Etat. A la différence que dans ce cas figure, il ne s’agit pas d’un emprunt qu’il faut rembourser, mais d’une
donation pour la satisfaction du bien de la communauté.
Le « adya » est une pratique instituée par le fondateur du mouridisme pendant sa résidence surveillée à Diourbel, dans le but de financer ses activités et d’acquérir une
autonomie financière. Pendant que l’autorité coloniale peinait à recouvrer les 15
francs d’impôt imposés au contribuable, les disciples mourides faisaient la queue
pour verser leur « adiya » de140 F à Cheikh Ahmadou Bamba.

Ce qui avait d’ailleurs amené le colon à saisir le fondateur du Mouridisme de
cette question : « Comment faites-vous pour amener les gens à vous verser 140 F,
alors qu’ils peinent à nous verser 15 F d’impôt ? ».                                                            La réponse du Cheikh fut sans appel : « J’investis ce qu’ils me donnent dans la voie de Dieu et pour l’intérêt collectif, alors que vous, vous en faites un usage personnel. »
Tout le monde en convient, le capitalisme financier est non seulement inhumain, mais
aussi dépourvu de toute forme de pérennité économique et sociale. Malheureusement, face à ce constat, les uns et les autres semblent être désarmés et complètement passifs ou
résignés. On sait, en effet que la grande victime du capitalisme financier et plus
précisément de l’économie ,boursière c’est le travail qui  se trouve être paradoxalement la source réelle de toute richesse. Les manipulations boursières portent un énorme préjudice à l’industrie et même au secteur agricole, car beaucoup de banqueroutes de firmes
industrielles et de certains secteurs de l’agriculture sont en fin de compte dues aux
fluctuations artificielles des valeurs boursières.
En tout état de cause, « Touba ca canam » et les autres entités mourides qui
œuvrent dans l’économie solidaire constituent des modèles de développement qui s’ils étaient appliqués au niveau étatique pourraient produire des résultats patents. Cela ne peut se faire que dans une relation de confiance mutuelle entre l’ Etat et ses administrés où le seul objectif est de travailler pour la communauté.

DIReCt News • QUOtIDIeN D’INFORMAtIONs GeNeRALes • veND. 14 & sAM. 15 AOUt 2020 • N° 163

pape sadio tHiam et
m.r.dia