Le fait est assez surprenant pour que l ’on se pose la question de savoir quelle symbolique attacher à la présence de drapeaux Russe dans les manifestassions à Dakar. Dès 2023, on a remarqué ces drapeaux dans les manifestations pour la libération des détenus politiques. Ce phénomène observé dans d’autres capitales africaines doit-il être considéré comme un simple mimétisme ? Certainement pas, surtout à la veille d ’un scrutin présidentiel ou ils sont réapparus. Il faut plutôt y voir la partie émergée d ’une géopolitique bien Russe qui use et abuse de la propagande et des usines à trolls.
L ’élection présidentielle au Sénégal est devenue une partie d ’échec à l ’échelle mondiale, peu perceptible de prime abord et, qu ’on pourrait qualifier de diplomatie agissante. L ’émoi suscité par le report du scrutin à eu des retentissements bien au-delà de la sphère politico-médiatique locale. L ’intervention de Washington et Paris s ’est fait entendre, Dakar ne doit pas et ne peut basculer du côté obscure de la démocratie. Moscou n’est pas absente de la scène politique Sénégalaise, elle fait flotter son drapeau au beau milieu de la capitale tout en évitant en pareille circonstance le discours impérialiste et hégémonique. D’aucuns usent de leurs pouvoirs d ’injonction ou de propagande médiatique “pour le respect du calendrier électoral”, la “liberté d’exprression”, tandis que d ’autres choisissent d’agir par personnes interposés pour des desseins inavoués mais souvent d ’ordres militaires, pétrolier et/ou gazier.
Cette élection présidentielle de 2024 pose une question existentielle au prochain Président de la république: Comment prospérer et assurer sa souveraineté dans un monde globalisé?
On dit que la géostratégie consiste à étudier les implications politiques et guerrières de situations géographiques (ressources naturelles, espaces frontaliers, espaces maritimes). Ces espaces bien que n ’étant pas structurellement stratégiques peuvent le devenir dès lors que le contexte politique, social ou économique évolue. Donc, ce petit pays géographiquement parlant, le Sénégal, voit son contexte évoluer et devenir le terrain de jeux de grandes influences. Cette élection est une étape décisive dans la perspective de positionnement géostratégique et géopolitique de certains pays, eu égard aux relations entretenues avec le Sénégal. Les accords de défense et de coopération militaire, la question de l ’approvisionnement ou de la souveraineté énergétique, la question sécuritaire dans la zone Ouest Africaine, sont autant de sujets d ’importance capitales qui interpellent nos présidentiables pour ce scrutin. Ces questions intéressent dans une moindre mesure mais non moins importante, Londres, Berlin, Paris, Moscou, Alger, Washington, Rabbat ou Nouakchott.
Allô Dakar, ici Moscou.
Moscou est résolument engagée à changer la dynamique géopolitique en Afrique et, cela s ’intensifie sur le plan militaire en Afrique de l ’ouest. En 2023, le Sénégal et la Russie ont signé des accords militaires inattendus; défense, formations de nos militaires et ventes d ’armes. Rien que ça ! Excusez du peu, suffisamment en tout cas pour susciter le courroux de la France, dont l ’influence au Sénégal est de plus en plus malmenée par le Président Macky SALL. A chaque occasion, ce crime de lèse-majesté ,comme bien d ’autres perpétrés contre les intérêts français nous vaut une réprimande. Aussi, penser que le bashing médiatique français, suite au report de l ’élection est une réponse du berger à la bergère va de soit. Quelle soit officielle ou officieuse, l ’influence russe semble bien réelle et elle n ’entend pas ce limiter qu’au domaine militaire. L ’exploitation de nos hydrocarbures et le gaz notamment n ’est pas en reste dans ce qui pourrait faire l’objet d ’accord entre Moscou et Dakar.
Ce qui se joue dépasse la perspective des revenus tant espérés que nous “Gorgorlous” attendons de l ’exploitation du gaz. Dakar est devenue une zone
d ’influence géostratégique après avoir finit de convaincre par sa diplomatie et Moscou entend bien y faire flotter son drapeau.
A défaut de pouvoir imposer un embargo durable ou contrôler l ’approvisionnement en gaz russe de l ’Europe via les gazoducs Nord Stream, Moscou semble opter pour le contrôle des infrastructures dans les pays producteurs comme le Sénégal. Ceci, notamment à travers le spécialiste russe des pipelines TMK, approché par les autorités sénégalaises en 2022. Mais l ’Europe doit assurer sa fourniture en GNL et ainsi échapper aux contingences Russe et le fait savoir jusqu’ici. l ’Allemagne, première cliente du gaz Russe, voit son chancelier Olaf Scholz débarquer à Dakar en mai 2022 pour négocier et surtout s ’assurer de pouvoir garantir son approvisionnement ainsi que celui du marché européen en gaz.
En amont, au beau milieu de la tempête BP, Londres dépêche un navire de guerre de la Royal Navy à Dakar fin 2021, le HMS Trent est l ’un des cinq navire de patrouille qui opèrent dans les zones d ’importance critique pour le Royaume Uni. Londres en effet ne pouvait ignorer le différent entre BP et l ’état Sénégalais sur l ’exploitation du gisement de gaz Yaakar – Teranga au large des côtes sénégalaises. C‘est pas une menace, tout juste le flegme Britannique. Finalement, BP se retire de ce gisement et, son partenaire Américain Kosmos Energy le remplace pour détenir 75 % de participation. Entente entre Britanniques et Américains pour contrer l ’ogre Russe ? Peut-être, même si cela semble trop gros. Il faut se rappeler qu’en 2020, les USA ont octroyé une subvention (un don) de plusieurs centaines de millions au Sénégal pour financer l ’étude de faisabilité du gazoduc intérieur terrestre. De quoi manifester tout l’intérêt de Washington pour cette question. La percée Russe n ’est forcément pas vue d ’un
bon oeil par les Etats-Unis et, Washington n ’a pas manqué l ’occasion de mettre du sable dans notre couscous quand la géopolitique sénégalaise lui en a donné l’occasion avec le report de la présidentielle.
Outre mesure, la bataille d ’influence sur le gazoduc en eau profonde ne laisse pas Rabbat en reste. Cette dernière milite pour une coopération sud-sud dans le cadre du projet de construction d ’un gazoduc Nigeria-Maroc qui assurément va concurrencer le projet d ’Alger. L ’Algérie, un autre protagoniste et producteur de gaz qu ’on entend régulièrement dans la politique intérieure pour son soutien avéré ou non en faveur d’un homme politique de l ’opposition au Président Macky SALL. Cette élection présidentielle donne également l’occasion à Doha, autre pays producteur de gaz, de s’illustrer par son soutien effectif auprès d ’un autre candidat.
Diplomatie agissante pour les uns, géostratégie pour les autres, ce qui se joue est l ’oeuvre de forces organisées, tout au moins plus organisées que nous ne le sommes. Le nier n ’est pas faire preuve de real politique. Lorsque nous en aurons terminé avec ces histoires de mandats, de parrainages, de constitution et je sais quoi d ’autres, il sera encore temps d ’élire un Président conscient des enjeux du moment, sinon le réveil sera brutal d ’ici 2030. Ceux qui prétendent vouloir tenir entre leurs mains la destinée de ce pays et de son peuple, ceux la ont une grande responsabilité devant l ’histoire.
Point de poussal ma tok.
Amadou Manel FALL<27>fallamanel@gmail.com