Le Président Macky Sall a-t-il violé la Constitution sénégalaise en prolongeant l’état d’urgence par décret sans l’autorisation de l’assemblée nationale ? Le débat secoue les milieux intellectuels sénégalais en cette période de crise sanitaire et économique.
Nous avons posé la question au professeur Ndiawar Soumare, directeur du Centre Stratégique Africain.
« Il est bon de rappeler ce que dit la Constitution sénégalaise sur le prolongement de l’état d’urgence (qui est organisé par la ‘Loi n° 1969/29 du 29 avril 1969 relative à l’état d’urgence et à l’état de siège’).
Dans son article 69, la Constitution sénégalaise précise que: « L’Etat de siège, comme l’état d’urgence, est décrété par le Président de la République. L’Assemblée nationale se réunit alors de plein droit, si elle n’est en session.Le décret proclamant l’état de siège ou l’état d’urgence cesse d’être en vigueur après douze jours, à moins que l’Assemblée nationale, saisie par le Président de la République, n’en ait autorisé la prorogation. »
Donc, en cas d’état d’urgence, la Constitution fixe clairement les attributions du président de la République qui est de le déclarer et d’y mettre fin. Elle fixe aussi les attributions de l’assemblée nationale qui est d’autoriser la prolongation de l’état d’urgence.
Voyons maintenant ce qui a été fait, si la procédure suivie par le Président de la République sénégalaise Macky Sall, pour prolonger l’état d’urgence, a respecté la Constitution ou non.
En effet, c’est le Décret n•2020-830 du 23 mars 2020 qui proclame l’état d’urgence sur l’étendue du territoire national.
Cet état d’urgence fut prolongé par le Décret n° 2020-925 du 3 avril 2020.
L’assemblée nationale a-t-elle autorisé cette prolongation comme le prévoit la Constitution? Voilà toute la question.
Il est clair que la procédure n’a pas été respectée. Donc ce décret prolongeant l’état d’urgence viole la Constitution.
L’état d’urgence est de nouveau prolongé par décret n•2020-1014, le 03 mai 2020 pour une durée d’un mois.
Mais dès lors que la première prolongation n’a pas respecté la forme, il est inutile de se prononcer sur les autres prorogations.
Cet état d’urgence n’était d’ailleurs pas nécessaire dans cette lutte contre la pandémie de covid-19, le couvre-feu instauré entre 20 heures et 06 heures du matin était largement suffisant, accompagné d’un dépistage de masse et l’isolement des malades. »
Afriact.com