La grande coalition de l’opposition en vue des prochaines élections locales, s’est faite sans le Parti démocratique sénégalais (Pds). Les libéraux fustigent le fait que plusieurs points de désaccord n’ont pas été résolus. Toutefois, au-delà de ces considérations évoquées çà et là par le parti du Président Abdoulaye Wade, force est de constater que le problème vient de Ousmane Sonko et de Karim Wade, respectivement dépositaires du Pastef et du Pds. Entre le leader du Pastef Ousmane Sonko et l’héritier de la formation libérale Karim Wade, c’est moins de petits désaccords qu’un choc manifeste des ambitions. Entre les deux, personne ne veut suivre le courant. Chacun veut indiquer le cap.
Comme nous le savons tous, Ousmane Sonko a fini avec le Pastef de séduire et de convaincre bon nombre de Sénégalais par ses sorties détonantes, son parcours et son intransigeance à l’encontre du Président Macky Sall et de son régime. Le discours passe. Et à ce titre, il est l’une des figures de proue de l’opposition, sinon le chef comme l’a dit un jour un certain Thierno Bocoum, qui l’accuse aujourd’hui de faire dans le diktat.
L’ex-inspecteur des Impôts est celui qui donne le la des initiatives dans l’opposition. Son influence est incontestable. Et pour le Pds et son coordonnateur Karim Wade, il est inconcevable de laisser à Ousmane Sonko le loisir de dérouler son agenda. D’autant que le « patriote », par bravade politique, a laissé entendre il y a quelques années que l’ancien ministre de l’Energie faisait partie du système qu’il combat. Evidemment, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts et depuis, le député est devenu plus pragmatique et plus lucide dans ses projections. Le ‘’système‘’ est plus rusé et plus huilé qu’il ne le pensait visiblement. A un moment donné, Ousmane Sonko était obligé, au risque d’être frappé d’ostracisme politique, de s’associer au combat pour la libération de Wade-fils et pour qu’il retrouve tous ses droits civiques et politiques.
Dans la foulée aussi, il a eu à rencontrer Abdoulaye Wade à plusieurs reprises. Ce dernier, en fin politicien, lui promettant monts et merveilles pour l’élection présidentielle de 2019. L’on se souvient que le candidat de la coalition Sonko-Président avait interrompu sa campagne pour venir rencontrer le chantre du ‘’Sopi‘’. Et pour certains, la messe était dite : le régime Macky-Sall n’allait pas résister au tandem Wade-Sonko. Mais, les observateurs avertis savaient que le Président Wade n’allait jamais ‘’livrer‘’ le Pds à Ousmane Sonko, au risque de compromettre la carrière politique de son fils, acquise dans la douleur. Et comme l’a dit un célèbre journaliste, ancien de «Jeune Afrique», c’est la neutralité pas du tout neutre de l’ex-chef d’Etat sénégalais lors de l’élection présidentielle, qui a aidé le Président Macky Sall à rempiler pour un second mandat. Cette élection aurait pu prendre une autre tournure si Wade avait soutenu Ousmane Sonko. Il y aurait probablement eu un deuxième tour. Et peut-être la chute de Macky Sall… Qui sait !
Mais ç’aurait été aussi une victoire à la Pyrrhus pour le Pds. Les chances pour Karim Wade de devenir président du Sénégal, s’envoleraient certainement avec l’avènement des ‘’patriotes‘’. Et qui est plus placé que le chevronné Me Wade pour comprendre tous ces enjeux ? Il ne s’est pas tout de même séparé d’identités remarquables comme Idrissa Seck, Macky Sall, Souleymane Ndéné Ndiaye, Omar Sarr et autres alliés, pour venir céder au projet de Sonko, aussi alléchant soit-il. Un romantisme trop beau et inaccessible pour nos hommes politiques.
DES PROMESSES DE RETROUVAILLES DE LA GRANDE FAMILLE LIBERALE ?
Il y a beaucoup de zones d’ombre non élucidées dans l’avenir politique de Karim Wade. Et l’un des points d’achoppement est probablement son affaire politico-judiciaire. Comment fera-t-il pour convaincre l’actuel Président de lui donner l’amnistie par le biais de ses députés ? Le Pds a-t-il toujours le même poids politique ? Son retour vat-il rebattre les cartes au sein de l’opposition ? Autant de questions en suspens. Mais ce qui est sûr, c’est que ‘’li mbëtt bëgg là bar bëgg‘’.
Abdoulaye Wade a été toujours dans sa logique. Et si pour les récalcitrants au sein du Pds, il était plus facile pour le pape du Sopi de les museler voire se débarrasser d’eux politiquement, pour Ousmane Sonko, il fallait trouver d’autres subterfuges. Quitte à faire semblant de projeter sa nostalgie sur la jeune figure montante de l’opposition. Mais, il a été toujours question de la carrière politique de Karim Wade. Abdoulaye Wade veut que son fils devienne président de la République du Sénégal. Donc le leader du Pastef et Wade-fils ne peuvent se retrouver que sur des considérations générales comme le fichier électoral, les questions de bonne gouvernance pour ne citer que ceux-là. Toutefois, une alliance de principes pour des élections entre les deux, semble illusoire. Même si la politique est une bouteille noire, ces deux ne cachent pas leur jeu, le Pds et le Pastef avec. 2024 oblige.
Par ailleurs, la politique étant le cimetière des amitiés et le berceau des retrouvailles pour reprendre Babacar Justin Ndiaye, d’ici 2024, il n’est pas impossible de voir la grande famille libérale se retrouver pour barrer la route à l’ascension fulgurante du leader du Pastef. D’ailleurs, parmi les dignitaires du Pds, il n’y a que Karim Wade qui n’a pas encore rejoint le régime. Macky Sall, en bon gestionnaire des contradictions en politique, a phagocyté tout le reste. Reste à gérer d’ici 2024, les plus ambitieux pour trouver un candidat de consensus pour le remplacer éventuellement. Du tout sauf Sonko n’est-il pas en gestation ? Attendons pour y voir plus clair ! Mais ce qui est sûr, c’est que le linge sale des libéraux peut se laver en famille. Ces gens se connaissent trop bien. Donc, que Ousmane Sonko ne se fasse pas trop d’illusion ! Il peut dérouler avec les autres mais Karim Wade et le Pds font partie des classiques en politique. Le comprendre très tôt serait mieux pour lui, sinon il recevra d’autres coups de massue. Le monde de la politique est intraitable. En attendant d’autres bouleversements peut-être…
L’AS