« On ne vous demande pas la finale, on veut la coupe ». Même si son sourire au bout montre qu’il n’a pas le ton des putschistes qui font face à leurs joueurs avec un discours militaire, Macky Sall n’a pas fait dans la langue de bois pour délivrer aux Lions du Sénégal un message clair avec un objectif bien défini, pour sa 5e cérémonie de remise de drapeau aux Lions du football après les éditions de la CAN de 2015, 2017 et 2019 et la coupe du monde de 2018. L’occasion de revenir sur ce moment particulier, souvent saisi par les hommes politiques pour faire passer des messages à l’endroit du peuple. Un show, parfois tout chaud….

La remise du drapeau national à une sélection nationale de football est un moment symbolique pour chaque pays. Il s’agit d’un moment solennel tenu souvent ou presque toujours dans l’endroit le plus solennel d’un pays, le Palais Présidentiel. Au-delà de la symbolique de remettre l’emblème du pays à des ambassadeurs en partance pour des empoignades aux fins de représenter leur Nation lors d’une compétition sportive, ce moment est aussi pour les Chefs d’État africains une occasion de délivrer un message fort de soutien et d’encouragements aux joueurs mais pas que. Plusieurs Président de la République profitent de cette tribune pour se signaler d’une façon particulière et cette édition camerounaise n’a pas dérogé à la règle.

Menaces voilées, discours guerriers, joueurs sous pression

En remettant le drapeau national aux joueurs du Syli national en route pour le Cameroun pour y disputer la CAN 2021, le Colonel Mamadou Doumbouya a tenu un discours pour le moins musclé et galvanisateur comme s’il était face aux éléments de l’armée. « Je vous confie le tricolore national en ce jour solennel. Tâchez de l’honorer, de le hisser très haut. C’est un privilège qui n’est pas donné à tout le monde. L’Etat cette année s’est saigné pour vous mettre dans toutes les conditions idoines. Ramenez la coupe à la maison… ou remboursez l’argent qui a été investi sur vous… », s’est lancé Mamadi Doumbouya, dans un one-man show qui a fait le tour du monde.

Le Colonel Assimi Goïta en a fait de même avec les joueurs du Mali. Le nouvel homme fort de Bamako les engagent à redonner espoir aux Maliens en ramenant cette 33e Coupe d’Afrique des Nations. Tout simplement. « Vous êtes condamnés à ramener le trophée », a-t-il déclaré, sans ambages, avant de conclure sur un « vous n’avez pas le droit à l’échec ».

Le souvenir de Robert Guei, l’opportunisme politique

L’échec, le Général Robert Gueï n’y avait pas donné le droit à la sélection ivoirienne à la CAN 2000 co-organisée par le Nigéria et le Ghana. Cités parmi les grands favoris de cette 22e édition, les Eléphants se sont fait éliminer dès le premier tour de la compétition. Humiliation suprême pour l’Ivoirien en chef de l’époque. Conséquence, les joueurs de l’équipe ivoirienne de football ont eu droit à leur retour au pays d’un stage d’éducation patriotique de trois jours au camp militaire de Zambakro. « J’ai souhaité que vous vous battiez pour la Nation, mais ce ne fut pas le cas », se justifiait ainsi Robert Gueï.

Pour d’autres pays comme le Sénégal, c’était surtout l’occasion pour le Chef d’État de renouer le fil avec ces idoles de la population et profiter des dividendes sur le plan politique. Comme quoi, plus qu’une simple remise du drapeau national, cette cérémonie peut cacher bien d’autres détails. Dans l’espoir de voir le drapeau flotter au-dessus de tous les autres sur le continent, pour encore capitaliser. Mais, au bout du tournoi, il n’en restera plus qu’un seul…

 

Pape Madiakhaté SARR