Si le pangolin était un arbre, l’homme devrait être son écorce pour le nourrir de sa sève et le protéger des intempéries. Mais force est de constater que ce mammifère dont l’existence favorise l’équilibre de l’écosystème, est le plus braconné par l’homme pour sa chaire et ses écailles auxquelles on attribuerait des propriétés médicinales. L’homme, censé être le bouclier, devient non seulement le bourreau du pangolin, mais aussi accuse injustement l’espèce d’être à l’origine de la pandémie du COVID19. Malgré les textes juridiques de certains Etats et des organisations de protection des espèces dont la CITES et aussi avec la collaboration et l’appui de certaines organisations internationales dont EAGLE-Togo, le pangolin reste toujours menacé d’extinction.

Ce qui est marrant, c’est que le pangolin, mammifère présent en Afrique et en Asie et long de 30 cm à 80 cm, n’est pas traqué pour devenir un trophée mais pour être revendu. Pour démontrer l’ampleur de la chasse aux pangolins, des chercheurs ont analysé des données issues de 113 sites, dans 14 pays d’Afrique centrale, principalement le Cameroun, la République centrafricaine, la Guinée équatoriale, le Gabon, la République démocratique du Congo et la République du Congo. Résultat, entre 500 000 et 2,7 millions de pangolins sont capturés chaque année dans les forêts de ces pays. Le plus souvent à l’aide de pièges, bien que leur utilisation soit illégale dans la plupart des régions de l’étude.

Pourtant, la Convention sur le Commerce International des Espèces de Faune et de Flore Sauvages Menacées d’Extinction (CITES) avait interdit toute commercialisation de l’animal. Sa vente illégale vers certains pays d’Asie reste, malgré tout, en forte progression. Les espèces asiatiques de pangolin sont devenues rares. Elles sont désormais classées au mieux « en danger » et au pire « en danger critique d’extinction » par l’Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN).

En mars dernier, les autorités ivoiriennes ont incinéré à Abidjan, en présence des hommes des médias, plus de 3,5 tonnes d’écailles de pangolin. Ces écailles avaient été saisies lors de diverses opérations en 2017 et 2018 et ont conduit à l’arrestation d’une vingtaine de personnes. Ces opérations ont été menées par des éléments de l’Unité de lutte Contre la criminalité Transnationale (UCT) et du Ministère des Eaux et Forêts avec l’appui technique du projet EAGLE-Côte d’Ivoire.

Selon le procureur de la République, Richard Adou, toutes les procédures de cette affaire sont « pendantes devant le tribunal de première instance d’Abidjan». Et déjà « une vingtaine de personnes incarcérées et ce n’est pas fini, le juge d’instruction n’a pas encore achevé sa mission ».

Plusieurs nationalités sont impliquées dans ces trafics « puisque ça concerne tous les pays de la sous-région », a souligné le procureur de la République, ajoutant qu’outre la criminalité transnationale, il s’agit d’une criminalité faunique dans la mesure où ça touche des espèces protégées.

Les trafiquants arrêtés encourent une peine de 12 mois de prison ferme, assortie d’une amende allant de 3000 à 300.000 Francs CFA, selon l’article N°65-255 du 4 août 1965 relatif à la protection de la faune et à l’exercice de la chasse de la Côte d’Ivoire. Cette loi connaitra selon nos sources, une révision avec des peines allant de 10 à 20 ans de prison ferme et d’une amende de 10.000.000 FCFA à 100.000.000 FCFA pour toute infraction concernant les espèces inscrites en annexe 1.

Au Togo, les agents de l’Office Central de Répression du Trafic Illicite des Drogues et du Blanchiment (OCRTIDB) avaient, avec le soutien technique d’EAGLE-Togo, arrêté en fragrant délit, en décembre 2018 à Lomé, deux trafiquants, une dame et son fils, alors qu’ils s’apprêtaient à vendre 37 kilogrammes d’écailles de pangolin.

Les peines encourues pour cette infraction sont fixées par l’article 761 du nouveau code pénal : «La destruction et la commercialisation, directe ou indirecte, sans droit d’espèces animales ou végétales protégées en vertu des dispositions législatives et réglementaires en vigueur et des conventions internationales auxquelles la République du Togo est partie est punie d’une peine d’un (1) à cinq (5) ans d’emprisonnement et d’une amende d’un million (1.000.000) à cinquante (50) millions sans préjudice de toute autre disposition du présent code»

Le trafic des espèces fauniques conduit non seulement à l’extinction de nombreuses espèces animales, mais aussi va au-delà de la destruction de la biodiversité. Le coronavirus sauvera-t-il le pangolin ? L’annonce par la Chine d’une interdiction « complète » du commerce et de la consommation d’animaux sauvages est une bonne nouvelle, mais devra être confirmée sur la durée. Cela va permettre de laisser les espèces sauvages tranquilles dans la nature faire partie de l’écosystème. (EAGLE-Togo)