Le chef de l’Etat Macky Sall a promis de ne plus s’impliquer dans les affaires politiques, après avoir transmis le pouvoir. Cette perspective n’augure rien de bon pour son parti. Non structurée et sans numéro 2, l’APR risque de payer cher son état d’armée mexicaine.
« Je ferai comme Abdou Diouf, je me retirerai complètement. » C’est l’engagement pris par le Président Macky Sall, dans un entretien avec l’hebdomadaire « Jeune Afrique ». Cette posture aura le don, à coup sûr, de ne guère gêner son successeur, qu’il soit de l’opposition ou du pouvoir. Le président Abdou Diouf tout comme son prédécesseur Léopold Sédar Senghor, ont observé, après avoir quitté le pouvoir, une nette démarcation avec la politique intérieure.
Jamais Diouf et Senghor ne s’étaient plus impliqués des affaires du pouvoir ou dans la formation politique qu’ils ont laissée. Même si le président Abdoulaye Wade (2000-2012) a rompu cette tradition, tous les trois prédécesseurs de Macky Sall ont eu presque un héritage identique : leurs partis politiques ont survécu. Si la survie du Parti démocratique sénégalais (PDS) peut s’expliquer par la posture de Me Wade, resté encore patron des libéraux, pour le Parti socialiste (PS), les raisons sont tout autres.
Senghor comme Abdou Diouf ont, en effet, quitté le pouvoir, en laissant une formation politique aux instances bien structurées et solidement implantée dans le pays. A la veille de la démission du président Senghor, Abdou Diouf avait déjà hérité du poste de secrétaire général du parti. Et au départ de Diouf, feu Ousmane Tanor Dieng a pris les rênes du parti. Au plan matériel, Ousmane Tanor Dieng et ses camarades ont également hérité de la Maison du parti, leur siège, un patrimoine, sans doute, inestimable.
Témoin d’une longue histoire politique, la Maison du parti était, à bien des égards, l’emblème d’un militantisme unificateur bâti pendant de longues années, difficile à abandonner. Et puis, les mauvaises langues suspectaient O. T. Dieng de contrôler une manne financière colossale laissée par Abdou Diouf. Vingt-trois ans après avoir perdu le pouvoir et le départ de ce dernier, suivi du décès d’Ousmane Tanor Dieng, le PS résiste à l’usure du temps. Le PDS également tient debout.
Les libéraux normalement engagés dans la future présidentielle, sont solidement amarrés au président Wade et à leur candidat Karim Wade. L’Alliance pour la République (APR) sera-t-il en mesure de survivre au départ de Macky Sall, décidé à suivre les pas du président Abdou Diouf ? On peut en douter. En cas de victoire du candidat Amadou Bâ, il devrait, s’atteler à prendre les commandes de l’APR. Au regard de la nature du militantisme sous nos tropiques, une vague d’allégeance au nouveau maître du Palais de la République devrait s’opérer.
Très peu, peut-être, prendraient le risque de se dresser contre Amadou Bâ, devenu président. « Rien pour autant n’est joué d’avance », analyse ce cacique de l’APR. Jusque-là non structurée, l’APR que laissera Macky Sall continuera, au moins aux premiers jours du magistère d’Amadou Bâ, d’être une « armée mexicaine. En dehors de son président connu, en l’occurrence Macky Sall, toutes les autres positions sont provisoires.
Aucun leader ou responsable ne peut revendiquer une fonction élective au sein de cette formation. Faute de numéro 2 comme au PS, au départ de Diouf ou d’une personne incarnant la locomotive à l’image de Karim Wade au PDS, l’APR risque de ressembler à une foule anonyme. Même si Amadou Bâ devient chef de l’Etat, rien ne lui garantit une soumission systématique« .
D’après « Point Actu », les querelles alimentées par les militants dits « authentiques », risquent de faire surface. Il faut alors s’attendre à une volonté de contrôler l’appareil du parti par ces militants dits « authentiques ». Une telle perspective est à craindre, notamment si Amadou Bâ cherche à mettre en place sa propre « team ». Les frustrés, adossés sur un militantisme des moments de galère, pourraient se rebeller.
La dislocation de l’APR est encore plus évidente, si Benno Bokk Yakaar perd le pouvoir à la prochaine présidentielle. Les alliés comme le PS et l’Alliance des forces de progrès (AFP), pourraient se retirer de la coalition et l’APR déstructurée, faute d’instances solidement implantées et structurées. Comme on le voit, par quelque bout qu’on envisage l’avenir de l’APR après Macky Sall, le risque d’une implosion n’est pas à écarter.