Définissant le plus grand mérite du haut magistrat vis-à-vis de l’Homme d’Etat à qui il doit sa position, un grand intellectuel français parlait de « devoir d’ingratitude ». Sous nos tropiques, il est désolant de constater que bien des collaborateurs des leaders appelés à quitter le pouvoir, appliquent de la plus cruelle des manières à leur bienfaiteur, celui à qui ils doivent tout, cette belle maxime, la vidant du coup de toute sa quintessence. En effet, à peine la fin du régime en place, établie par le verdict implacable des urnes, que de minables chiens enragés longtemps emmitouflés dans des peaux d’agneaux, se mettent à tirer à bout portant sur le président sortant, qui leur a rendu leurs meilleurs services de leur pauvre existence.

Depuis quelques heures, le Président Macky Sall est peint sous des traits peu flatteurs, et contre toute attente, par des gens qui, en principe, ne devraient ouvrir la bouche que pour le célébrer avec force superlatifs. Deux d’entre eux, ont particulièrement retenu notre attention. Il s’agit de Oumar Sow (Conseiller spécial du chef de l’Etat) et de Moustapha Diakhaté (ancien président du Groupe parlementaire Benno Bokk Yakaar).

Le premier, est-il besoin de le préciser, est connu comme un nain parmi les nains politiques. Ancien marchand ambulant dans un pays d’Afrique et détenteur d’aucun diplôme ni d’aucune qualification digne de ce nom, M. Sow est un looser patenté, qui a encore été battu à plate couture lors de cette dernière élection dans la circonscription de Yeumbeul, où il n’est jamais parvenu à se tailler une étoffe de leader sous la bannière du parti au pouvoir. C’est ce monsieur au carnet d’exploits presque vierge, qui s’est empressé de se faire inviter à la télé, pour descendre en flammes le « Macky », en portant à son encontre des allégations saugrenues.

A l’en croire, la défaite cuisante de monsieur Amadou Bâ ne serait ni plus ni moins que l’expression d’une volonté machiavéliquement orchestrée, par celui-là même qui acté sa candidature, le Président Macky Sall. Et pour justifier ses accusations, l’homme a aligné moult explications anecdotiques, que toute raison raisonnante peinerait à cautionner.

Quant au second, il est tellement habitué à des gaffes et des énormités qu’on ne sait même plus si cela en vaut la peine de soumettre ses interventions (toujours fracassantes) à un examen critique. Apparemment très en colère contre l’homme qui l’a extirpé de son statut de « naïm » pour l’élever au grade d’homme politique d’envergure, avec attribution de charges particulièrement honorables, monsieur Diakhaté s’est rageusement défoulé sur son plus grand bienfaiteur, en l’accusant d’avoir trahi son parti, et par-delà, le peuple sénégalais.

Pourquoi ? Parce durant ces derniers temps, il se serait outrancièrement investi dans des calculs de bas étage, rien que pour faire foirer la candidature de monsieur Amadou Bâ, qui s’était imposé à lui. Selon lui, le report de l’élection pour lequel Macky Sall aurait grillé toutes ses professions de foi républicaines, n’avait pour être finalité que d’écarter monsieur Amadou Bâ, de la course aux fins de se choisir un autre vrai candidat, en qui il a réellement confiance.

Toute proportion gardée, le président sortant ne mérite pas ça !

La posture déloyale de ces deux « vipères » n’est pour l’instant, que l’arbre qui cache la forêt. En effet, de toute évidence, au fur et à mesure que la personne de Macky Sall se dépossédera de son manteau de chef de l’Etat, on verra encore et encore, pas mal de flagorneurs d’hier, lui servir des notes incroyablement négatives, qu’ils n’auraient jamais concoctées si la victoire était du côté de la majorité. Ce qui est d’autant plus déroutant, est qu’on nous a soufflé que toutes ces vagues d’accablements qui ont commencé à rouler vers le « Macky » (et qui ne sont pas prêtes de s’arrêter !), seraient soigneusement orchestrées par un homme dont les basses manœuvres pour accéder au pouvoir, ont fait échec. Il serait en train de commander partout des notes critiques contre le « Macky ». C’est hallucinant, non ?

Triste destin donc que celui des hommes qui ont eu l’insigne honneur de servir leur peuple au plus haut sommet de l’Etat ! Aujourd’hui que la défaite a fini pour la première de planter ses serres dans la nasse des prétentions, on veut se permettre, pour des raisons inconcevables, d’enterrer tout ce que cet homme a apporté en termes d’actes concrets allant dans le sens de l’émergence de ce pays qui nous est si cher.

On veut oublier qu’il a rapproché les Sénégalais par une extension inédite du réseau routier ; par un développement exponentiel des pistes de production ; par un travail d’électrification rurale à une échelle inespérée. On veut oublier qu’il a relevé la dignité de l’image de maintes cités religieuses, en y ordonnant la construction d’infrastructures d’une modernité indiscutable. On veut nous faire oublier qu’il a déclenché une guerre farouche conte la misère et la pauvreté, en contenant la spirale de la paupérisation par la miraculeuse politique des bourses familiales. On veut nous faire oublier qu’il a consenti une augmentation inédite des salaires de de nos chers et vaillants enseignants. On veut nous faire oublier qu’il a mis fin au calvaire légendaire des voyageurs qui, pendant de longues années, devaient passer des dizaines d’heures pour traverser le petit tronçon qui relie le Sénégal à la Gambie.

C’est vraiment là, une bien triste manière de remercier un président qui a fait tout ça et tant d’autres choses encore. Il n’est certes pas exempt de reproches, sur certains points. Mais la vérité est que nous devrions à l‘heure actuelle, au moment où il s’apprête à quitter le pouvoir, après avoir félicité son successeur, nous devrions donc faire l’effort de retenir surtout le grand bond en avant qu’il a fait faire à ce pays, durant les douze années qu’il a occupé le pouvoir. Car comme le disait si justement le poète Aragon, « de deux interprétations, il faut toujours choir la plus généreuse ».

Momadou Fall,
Responsable politique,
BBY