Depuis le départ d’El hadji Hamidou Kassé, le ministre Seydou Guèye est aux commandes de la communication de la présidence de la République. D’un autre côté, le journaliste Abdou Latif Coulibaly porte la parole de la présidence. Un duo qui, estiment des journalistes et analystes politiques, fait des résultats sur la forme. Le fond laisse encore à désirer. Pour les convaincre, le couple devra corriger beaucoup d’aspects dans la communication de Macky Sall.

«Sans enjeu personnel ni aucune forme de compétition»

L’instant est une occasion en or, une immense opportunité pour jeter un faisceau de lumière sur le couple de com’ du Présidence de la République, sur le duo Abdou Latif Coulibaly-Seydou Guèye, le nouveau binôme de communicants censés redonner du tonus à la voix du Palais. Malmenée par une sortie de route de El Hadji Kassé au lendemain de retentissante affaire Aliou Sall-Bbc-Bp, qui avait tenu en haleine le pays, voire le monde, et lancée dans une drôle d’opération de rattrapage, la communication de la Présidence de la République est restée pendant un bon moment dans un sale état. Critiquée de tous, jugée incohérente dans ses sorties, incompétente dans son contenu. Une situation qui aurait obligé Macky Sall à réorganiser ce service de la Présidence, avec des hommes rompus à la tâche. Journaliste de profession, communicant au bagout de rhéteur, Abdou Latif Coulibaly, qui est militant de l’Alliance pour la République (Apr), est nommé le 25 juin 2019 par le même décret n°2019/1066 que Seydou Guèye, ancien ministre porte-parole du gouvernement et du parti présidentiel. Depuis, la com’ du Palais semble travailler sur de nouvelles bases, avec des innovations. Dont la plus éloquente est la conférence de presse du 31 décembre dernier, organisée avec des journalistes triés sur le volet, juste après l’adresse à la Nation du chef de l’Etat. Mais comment Abdou Latif Coulibaly et Seydou Guèye travaillent-ils ensemble ? Quelle est l’organisation actuelle de la communication de la Présidence de la République, siège de l’Exécutif Sénégalais ? N’y a-t-il pas chevauchement dans les prérogatives de l’un et de l’autre, tellement les missions semblent identiques ?

«Chacun de nous sait ce qu’il doit faire»

Ce 31 décembre 2019, les ministres Abdou Latif-Coulibaly et Seydou Guèye veillent au grain. Ils sont assis derrière le chef de l’Etat, qui déroule face à la presse. Mais le caméraman de la Rts qui filme l’instant télé, suivi par des millions de Sénégalais, ne manque pas de faire des gros plans sur le tendem. Après le Président Sall, très à l’aise dans son grand boubou marron, ils sont les vedettes du jour. Le couple est concentré sur son sujet. Mais quand la pression retombe quelques jours plus tard et que la mission se révèle à ses yeux une grande réussite, le binôme est revenu sur cette soirée exceptionnelle au Palais. Et surtout sur son organisation. «L’initiative de la rencontre entre le président de la République et la presse, le 31 décembre dernier, a été portée, selon le ministre Abdou Latif Coulibaly, par le ministre Seydou Guèye.» Dont le management de la communication relève de sa prérogative. Mais dans l’exercice de cette mission, il n’a pas agi seul. Le responsable de la Communication du Palais a associé son voisin de bureau, son collègue ministre porte-parole du président de la République, Abdou Latif Coulibaly. «Il lui arrive souvent de solliciter son expérience. Les deux hommes dont les liens professionnels sont facilités par l’étroitesse de leurs relations privées, se sont penchés en parfaite intelligence sur les préparatifs de ce grand rendez-vous», trahi un collaborateur du duo en charge de la communication de la Présidence de la République. «A chaque fois qu’il pense que je peux lui apporter quelque chose, on en parle», confirme l’ancien journaliste Abdou Latif Coulibaly.

Même si les champs d’action sont clairement définis, avec des lettres de missions différentes, les deux hommes travailleraient en complémentarité au service du président de la République. «Sans enjeu personnel. Ni aucune forme de compétition», souffle le même collaborateur. Le ministre Abdou Latif Coulibaly intervient dans l’ombre sur les actions de Seydou Guèye, qui le sollicite, le contraire n’est cependant pas évident.» Dans sa mission, l’ancien journaliste n’est chargé que d’une partie du travail de communication. Abdou Latif Coulibaly en fait la précision. Il dit ne pas s’occuper de la communication du président de la République. «Chacun de nous sait ce qu’il doit faire. Je porte la parole de la présidence de la République. Aussi bien celle du président de la République que des services qui sont à la Présidence, explique-t-il. On me demande d’aller dire les choses, je les dis». Et s’il a des initiatives qu’il souhaite prendre, il en parle à qui de droit, le Président Sall. «Soit j’interviens oralement ou par écrit. Je rends compte directement au chef de l’Etat, tout comme lui il rend compte au chef de l’Etat», explique Latif Coulibaly. Histoire de circonscrire son champ d’action, mais aussi de définir son niveau de positionnement sur l’échelle hiérarchique.

 

La recette pour rendre plus efficace  la com’ du Palais

En plus de «travailler en harmonie» avec Abou Latif Coulibaly, Seydou Guèye indique que les nouveaux services rattachés à la cellule de la Présidence de la République sont venus rendre plus efficace la Com’ du Palais. Il évoque le Bureau d’information gouvernementale (Big), lancé en septembre 2018. Ce bureau, dirigé par l’ancien journaliste du Soleil, Doudou Sarr Niang, est composé d’un département administratif et financier, d’un service des opérations et de la production multimédia et d’un département service baromètre, observation de l’opinion publique et sondages. «Le Big, explique le ministre-conseiller Seydou Guèye, a des outils, des instruments qui produisent de l’information sur les réalisations du Président Sall et sur les questions d’intérêt national. Aussi bien au service du président de la République que du gouvernement, ce support  travaille à côté du pole communication de la Présidence.»

Le duo de communicants du Palais est aussi épaulé par la cellule de l’unité digitale, qui travaille sur les réseaux sociaux. «A la date d’hier, 16 janvier 2020, le compte Twitter du président de la République, créé depuis 2010, comptait 1 061 000 suiveurs. La page officielle du président de la République sur Facebook enregistrait 464 000 abonnés. Ce qui fait de Macky Sall le Président le plus suivi en Afrique francophone, affirme Ousmane Thiongane, coordonnateur de l’Unité digitale de la Présidence. Et sur le continent, il fait partie des six présidents les mieux suivis. D’ailleurs, la présidence fait moins de communiqués, parce que la page Twitter du président se porte bien.» L’autre changement apporté par le duo Latif-Seydou Guèye et qui impacterait la com’ présidentielle, c’est que maintenant tous les services qui interviennent dans la communication sont regroupés dans le même espace de travail au Palais. Ce qui faciliterait les réunions de coordination pour le suivi et la veille communicationnelle. «Nous essayons d’avoir des démarches stratégiques. Ce qui a changé, c’est que nous avons encore fini d’organiser la communication, nous sommes en train de l’orienter et de l’animer à travers les structures mises en place», explique Seydou Gèye, le ministre en charge de la Communication présidentielle.  Il souligne, une dernière fois : «Avec le ministre Abdou Latif Coulibaly, tout se passe super bien.» Les atomes son crochus.

AIDA COUMBA DIOP