Mardi 4 avril, Donald Trump a pu quitter, sans aucune condition ni mesure de contrôle judiciaire, le tribunal pénal de Manhattan, à New York, où il a été officiellement inculpé dans une affaire de fraude liée à de l’argent versé en 2016 à l’ancienne star du porno Stormy Daniels.
L’ancien locataire de la Maison Blanche (2017-2021) et candidat à un nouveau mandat présidentiel s’était rendu devant un juge en début d’après-midi, heure locale, pour une audience historique au cours de laquelle il a plaidé non coupable.
L’ancien président, le premier à subir un tel sort judiciaire, pourrait donc avoir à affronter un procès, possiblement en janvier 2024, même s’il va tout tenter pour éviter cette épreuve. Un de ses avocats a déploré une « triste » inculpation et a promis de la combattre.
Un portier, une ancienne maîtresse et une actrice de X
« Ça semble si SURRÉALISTE – WOW, ils vont M’ARRÊTER. Je n’arrive pas à croire que ça se passe en Amérique », a-t-il écrit sur sa plate-forme Truth Social alors qu’il se rendait au tribunal, sous le regard des chaînes d’information du pays.
Après un lundi sous une extraordinaire tension médiatique, la justice new-yorkaise a interdit les caméras de télévision et tout autre mode de transmission à l’intérieur du prétoire. Une unique caméra positionnée dans un couloir du palais de justice a capté les premières images de l’ancien président des Etats-Unis, qui n’a pas pris la parole à son arrivée.
Le visage fermé, Donald Trump est entré dans une salle d’audience où il s’est assis entouré de ses avocats, selon une photo le montrant silencieux. Il est visé par 34 chefs d’accusation, qui devaient être rendus publics par le procureur de Manhattan qui le poursuit, Alvin Bragg, un élu démocrate.
Ce dernier a annoncé dans un communiqué que Donald Trump était inculpé par la justice new-yorkaise parce qu’il a « orchestré » une série de paiements pour étouffer trois affaires embarrassantes avant l’élection présidentielle de 2016. Un portier de la Trump Tower, qui prétendait avoir des informations sur un enfant caché, a reçu 30 000 dollars pour garder le silence ; une femme qui se présentait comme une ancienne maîtresse a touché 150 000 dollars pour se faire discrète tandis qu’une actrice pornographique, très probablement Storym Daniels, a perçu 130 000 dollars pour taire une prétendue relation extraconjugale, a détaillé le procureur Alvin Bragg.
Au cours de sa comparution, Donald Trump était censé se soumettre au rituel imposé à tout prévenu : décliner son nom, âge, profession, effectuer un relevé d’empreintes digitales et être pris en photo, le fameux mugshot, source de tant d’humiliations publiques pour les stars aux Etats-Unis.
Mais son statut de haut dignitaire américain protégé par le Secret Service, agence consacrée à la protection des personnalités publiques, lui a offert quelques aménagements. Il n’est pas apparu menotté. Il a ensuite été laissé en liberté sans condition, en attendant l’organisation de son procès à une date ultérieure.
Le juge Juan Merchan a déclaré qu’un procès pourrait commencer possiblement en janvier prochain, les avocats de Donald Trump présents à cette audience historique préférant le printemps 2024.
L’homme d’affaires new-yorkais, qui a fait fortune dans l’immobilier et la télévision, a donné rendez-vous à ses fidèles et ses dizaines de millions d’électeurs pour une conférence de presse depuis sa résidence Mar-a-Lago, en Floride, à 20 h 15 (après minuit en France hexagonale).
Une possible violation électorale
Cette affaire remonte à l’actrice de films pornographiques Stormy Daniels. De son vrai nom Stephanie Clifford, cette femme, qui collabore avec la justice depuis cinq ans, était censée taire une supposée et très brève relation extraconjugale en 2006 avec Donald Trump.
Les 130 000 dollars qu’elle avait touchés de Michael Cohen, un ancien avocat et homme à tout faire de l’ancien président, qui a fait de la prison et s’est retourné contre son patron en 2018, n’avaient pas été déclarés dans les comptes de campagne du candidat Trump à la présidentielle de 2016.
Il s’agit d’une possible violation des lois électorales de l’Etat de New York : cette somme avait été enregistrée, potentiellement illégalement, comme « frais juridiques » dans les comptes de son entreprise Trump Organization, déjà condamnée en décembre et janvier à une amende au civil de 1,6 million de dollars pour fraudes.
Au-delà de cette affaire, Donald Trump, qui a bouleversé le système politique et la société aux Etats-Unis en moins de dix ans, est visé par d’autres enquêtes, en particulier sur son rôle dans l’attaque du Capitole, le 6 janvier 2021, sa gestion des archives présidentielles ou encore des pressions exercées sur des responsables électoraux en Géorgie pour contester sa défaite à la présidentielle de 2020.
La police de New York « en alerte »
Les autorités, inquiètes pour la sécurité autour du palais de justice de Manhattan, ont placé la police de New York « en alerte » et le maire Eric Adams a mis en garde lundi les « fauteurs de troubles ».
Des partisans de Donald Trump, emmenés par la parlementaire républicaine d’extrême droite Marjorie Taylor Greene, ont commencé à se regrouper dans la matinée face au tribunal. Une poignée de pro et anti-Trump ont échangé quelques invectives, des opposants ont déployé une immense banderole « Trump ment tout le temps ».
Le milliardaire clame son innocence et assure être victime d’une « chasse aux sorcières » orchestrée par les démocrates du président Joe Biden, qui lui aurait « volé » sa victoire à la présidentielle de 2020. Il a encore dénoncé mardi matin, sur sa plate-forme Truth Social, un « tribunal bidon » et un juge « très partisan ».