Tombés dans la désuétude depuis belle lurette, les chemins de fer du Sénégal s’apprêtent à se relever de leur léthargie à partir de la région Thiès, située à 70 kilomètres de Dakar.
Après plusieurs années de mutisme, le train a sifflé ce mardi 27 février dans la ville de Thiès, surnommée « la cité du rail ». Le son a réveillé des frissons indescriptibles chez les cheminots retraités assis à la tribune officielle de la gare de Thiès, flambant neuve. Ces vétérans, qui sont témoins de l’âge d’or du transport ferroviaire sénégalais, à l’époque où le train roulait de Dakar à Bamako, font partie des principaux invités de la cérémonie de lancement officiel de la reprise du transport-voyageurs par train sur l’axe Thiès – Diamniadio, soit une distance d’environ 35 kilomètres.
Au moment où certains d’entre eux arrêtent d’égrener leur chapelet, à l’écoute du son mythique que les bruits stridents des sonos ne parviennent même pas à noyer, d’autres regardent nostalgiquement la nouvelle génération de cheminots s’affairer à différentes tâches. Ils ne pouvaient pas manquer ce rendez-vous parce qu’ils se devaient de venir ne serait-ce que pour leurs « collègues décédés et pour ceux qui sont malades », soutient Manar Sall, représentant des cheminots des Grands trains du Sénégal (GTS SA), la société publique qui gère le volet du transport ferroviaire des voyageurs et du fret.
Cette reprise du transport-voyageurs par train rentre dans le cadre global de la relance du chemin de fer au Sénégal. Elle se matérialise, après une léthargie de plusieurs années, par la réfection des lignes de chemins de fer commencée depuis plusieurs mois par les ouvriers de la Société nationale des chemins de fer du Sénégal (CFS), sous l’impulsion du directeur général Malick Ndoye. La première phase concerne l’axe Dakar-Tambacounda (est) alors que la deuxième se prolongera jusqu’à la ville de Kidira, à la frontière avec le Mali.
Une « histoire ferroviaire »
De nouvelles rames sont également acquises par les autorités pour le transport des personnes et des marchandises. L’objectif visé est d’accélérer le développement socio-économique en fixant les camions maliens, qui viennent par centaines quotidiennement dans la capitale sénégalaise pour se ravitailler en divers produits et denrées, dans la région de Tambacounda et en réduisant drastiquement le nombre d’accidents enregistrés sur la route. Ainsi, pour la phase entre Thiès et Diamniadio, dix trains vont circuler par jour pour des tarifs classés entre 1000 et 1500 francs CFA.
« C’est un grand jour pour les Thiessois », affirme Babacar Diop, le maire de cette ville dont « l’identité est liée au chemin de fer ». « Thiès est une ville ferroviaire. Les cheminots ont rédigé son histoire. Depuis que je suis devenu maire de cette localité (en janvier 2022), la seule doléance que j’ai exposée au président Macky Sall était de réhabiliter le chemin de fer » pour la reprise du trafic qui faisait vivre plusieurs activités connexes, précise M. Diop, opposant du régime en place et candidat recalé de l’élection présidentielle prévue cette année.
« Ce 27 février 2024 est un grand jour, car il marque la connexion ferroviaire permanente entre le département de Thiès et la capitale Dakar, via la gare emblématique de Diamniadio. Quel bonheur pour les Thiessois ! », s’est extasié Pape Amadou Ndiaye, ministre auprès du ministre des Transports terrestres et du Désenclavement en charge du Développement des Chemins de Fer et non moins responsable politique du parti au pouvoir dans la ville.
Une gare « symbolique »
Tout de blanc vêtu et acclamé par plusieurs de ses souteneurs déplacés pour cette réception officielle aux allures de meeting politique, il rappelle triomphalement la réalisation du Train express régional (Ter) par le chef de l’Etat sortant, « une infrastructure de transport de masse moderne, rapide, sécurisée et structurante ». Poursuivant, le ministre souligne que « la vision du président Macky Sall est de faire redevenir Thiès la ville de l’industrie ferroviaire et le centre de formation aux métiers du transport ferroviaire ».
Optimiste pour l’avenir, il note que « cette belle gare est le symbole de la renaissance des chemins de fer du Sénégal ». « Les enjeux pour la reprise du trafic, la problématique de la mobilité des personnes et des biens, aussi bien en zones urbaine, périurbaine et interurbaine, demeurent une priorité majeure pour le gouvernement. Depuis 2012, l’Etat multiplie les efforts pour la renaissance des chemins de fer », a indiqué M. Ndiaye.
ODL/ac/APA