Ils ont cru qu’une loi suffirait à tout effacer. Que quelques lignes de texte pourraient faire disparaître le sang versé, la douleur des familles endeuillées, le deuil d’un peuple. Mais les vies brisées ne sont que la face visible d’une tragédie plus profonde. Derrière elles, c’est tout un pays qui porte les stigmates, une nation fracturée, une confiance trahie.

Ils ont creusé un gouffre entre les forces de l’ordre et les citoyens qu’elles devaient protéger. En détournant le rôle de l’uniforme, ils ont terni l’honneur de ceux qui avaient prêté serment. Des hommes sans foi ni loi, déguisés en policiers, ont reçu des armes et des ordres : non pas pour défendre la République, mais pour réprimer la contestation, museler l’indignation. Ils ont tiré dans l’ombre, effacé les traces, et recouvert les cadavres d’un silence pesant.

Ils ont voulu étouffer les voix libres, faire taire ceux qui demandaient des comptes, qui cherchaient à comprendre. La peur est devenue doctrine, la justice un instrument de terreur. Face à eux, des opposants enfermés, exilés, réduits au silence. Un pouvoir écrit dans le sang, scellé par des larmes.

Mais leur violence ne s’est pas arrêtée aux corps. Elle a gangréné les esprits. Ils ont enchaîné ceux qui devaient porter la voix du peuple, les réduisant à des pantins, prisonniers de leurs propres compromissions. L’illusion du pouvoir et les promesses de gloire ont servi de chaînes dorées, troquant l’honneur contre des privilèges éphémères. Ceux qui devaient défendre la vérité ont détourné le regard.

Mais la vérité, elle, ne se tait pas. Le peuple n’oublie rien. Il sait qui a donné les ordres, qui a exécuté, qui a protégé les bourreaux. Il sait que la justice ne se mendie pas auprès de ceux qui l’ont bafouée.

Aujourd’hui, le bouclier de l’amnistie s’effrite, et avec lui s’effondrent les illusions. Ceux qui ont tué, torturé et trahi devront rendre des comptes. Ils devront affronter l’histoire, porter le poids de leurs actes.

Car tant que la justice ne sera pas rétablie, les âmes des disparus hanteront la conscience nationale. Leur silence, plus puissant que mille discours, continuera de résonner.

Fatou Ouleye Sambou
Journaliste / Experte en Communication

Par devoir, pour le peuple.