Nombreux étaient ceux qui doutaient de la bonne foi des auteurs du rapport de l’OFNAC sur les 94 milliards. Et des fonctionnaires dans cette institution ont émis des réserves quant à la fiabilité du rapport dont le contenu serait incomplet par rapport au document officiel remis au Chef de l’Etat. Pire encore, une partie importante des interrogatoires a été escamotée.
Ce qui a donné au rapport rendu public un caractère à charge, inéquitable et déséquilibré. Mais le plus étonnant c’est que l’OFNAC est en retard dans sa procédure, car le dossier des 94 milliards a été vidé par la Cour d’appel de Dakar dont l’arrêté de Juillet 2021, a rendu caduque toutes les conclusions de l’OFNAC dépassé du fait de ses lenteurs et décrédibilisé à cause de sa démarche purement politicienne.
Malgré cela, il a tenu à collaborer pour l’éclatement de la vérité. Mais, la suite a confirmé ses doutes sur le professionnalisme de l’enquêteur en question. Ainsi quelques mois après, des extraits du rapport provisoire destiné au Chef de l’Etat, ont été publiés dans la presse avec le même titre : «L’OFNAC confirme Ousmane Sonko». Immédiatement, le rapprochement était fait entre le Sonko de l’Ofnac et le Sonko de PASTEF. Sans nul doute, il y a encore plusieurs fonctionnaires mauvais exemples comme le capitaine Touré au sein de l’Administration sénégalaise et à tous les niveaux. C’est ce qui explique les nombreuses fuites dans les rapports de l’OFNAC et ailleurs.
L’OFNAC CONCOCTE UN RAPPORT A CHARGE, INEQUITABLE ET ESCAMOTE
Faudrait-il s’inquiéter de la politisation de l’OFNAC ? La réponse est affirmative. La politique est entrée dans cette Institution et la présidente Seynabou Ndiaye DIAKHATE n’a rien vu venir. Jetons un coup d’œil sur le rapport sur les 94 milliards francs CFA.
«Le 10 avril 2018, l’Office national de lutte contre la Fraude et la Corruption a été saisi d’une plainte du sieur Ousmane SONKO, député à l’Assemblée nationale et Président du parti politique « Pastef – les – Patriotes », pour des faits supposés de « transactions immobilières irrégulières et de détournements de deniers publics » portant sur un montant de 94 783 159 000 FCFA » lit-on dans l’introduction du rapport de l’OFNAC sur l’affaire.
Or dans sa plainte, Monsieur Ousmane SONKO a écrit : «Après plus de huit (08) mois d’investigation, nous mettons à votre disposition des éléments qui pourraient être constitutifs d’un détournement de deniers publics et portant sur plus de cent milliards sur l’ensemble des actes posés ».
Il a été donc remarqué la modification de la qualification des faits tels que rédigés par le leader de PASTEF. Car Sonko parle «d’un détournement de deniers publics ». Là où l’Ofnac travestit la qualification des faits visés par l’auteur de la dénonciation, en parlant de «transactions immobilières irrégulières et de détournements de deniers publics ». Or la «transaction immobilières irrégulières » ne figure pas sur la plainte d’Ousmane SONKO. Plus grave encore, il ne s’agit pas d’une «transaction immobilière» mais plutôt d’un rachat de créance.
Alors, qu’est ce qui peut justifier ce glissement fait par les enquêteurs qui ont dansé plus vite que la musique ? C’est la première entorse dans cette enquête de l’OFNAC. Et cela peut être expliqué par les relations proches entre Monsieur Sonko de l’OFNAC et Monsieur Sonko de PASTEF. Peut-être, dans l’élaboration de l’enquête, les enquêteurs se sont rendu compte que le délit de détournement de deniers publics était inexistant. Puisqu’en la matière, le Code pénal est clair. On ne peut parler de détournement de deniers publics que lorsqu’il y a un manquant initial. Dans cette affaire, aucun corps de vérification de l’Etat à savoir le Contrôle financier, la Cour des Comptes, l’ARMP, la DCMP, l’IGE, n’a relevé un quelconque détournement de 94 milliards dans les caisses de l’Etat. Mieux encore, ni le Ministère des Finances et du Budget encore mois la Direction du Budget ou des Impôts et Domaines n’ont confirmé un manquement dans les caisses de l’Etat. Dans les budgets de l’Etat de 2016 à 2019, il n’a nullement été mentionné un trou de 94 milliards détournés.
L’OFNAC ECARTE LE DETOURNEMENT DE DENIERS PUBLICS
Dans le rapport, on peut lire : «Le dénonciateur, Ousmane SONKO, ayant suspecté « une machination aux fins de détournement de deniers publics » notée dans cette procédure d’indemnisation, a relevé plusieurs anomalies ». A la lecture de ce bout de phrase, on retient les mots «suspecté » et «une machination aux fins de détournement ».
On se demande alors si des enquêteurs sérieux peuvent se fonder sur des «suspicions» pour asseoir une culpabilité en se détournant des faits ? Il est évident qu’on n’est pas dans la philosophie mais plutôt dans une procédure d’enquête qui doit se nourrir de faits irréfutables et pas de «suspicions» ou d’approximations paresseuses.
Suspecter «une machination aux fins de détournement de deniers publics » ne saurait suffire pour prouver un détournement avéré de deniers publics. En droit ou en matière administratif, les mots ont leur sens.
Les enquêteurs ont dévoilé leur certaine incompétence lorsqu’ils écrivent : «ayant suspecté une machination aux fins de détournement de deniers publics». Soit, les 94 milliards ont été détournés des caisses de l’Etat, soit cette accusation n’a jamais eu lieu. Et on en tire les conclusions sans verser dans la politique partisane contre le pouvoir en place, contre un opérateur économique ou un fonctionnaire. Les subtilités de langage des enquêteurs dans leur qualification des faits prouvent qu’ils n’ont aucune certitude dans ce qu’ils ont écrit dans ce rapport.
Les enquêteurs de l’OFNAC auteurs de ce rapport, souffrent d’un manque de sérieux. En tout cas, c’est ce qui découle de leur rapport sur cette affaire qui a défrayé la chronique depuis 2019. Les Sénégalais sont restés sur leur faim après la lecture de ce rapport qui n’a nullement prouvé le détournement mentionné sur sa lettre de dénonciation par Ousmane SONKO.
Comment peuvent-ils écrire que «les investigations menées ont permis de confirmer la quasi-totalité des griefs soulevés par le plaignant » ? D’abord, il n’y a pas eu plusieurs griefs soulevés par le leader de PASTEF. Monsieur SONKO n’a parlé que de détournement de 94 milliards. Donc, les investigations ne pouvaient pas aller dans tous les sens, puisque l’accusation et la dénonciation est claire et précise.
En plus, l’Ofnac n’est pas habilité à «confirmer» ou à infirmer une affaire. Le rapport relate des faits et saisit le procureur si des indices de manquements ont été relevés dans un dossier. Il reviendra alors au procureur d’enclencher une procédure judiciaire puisque l’OFNAC n’est qu’une chambre administrative incompétente pour lancer des poursuites.
Malheureusement, en passant outre leurs prérogatives, les enquêteurs, comme s’ils étaient en mission commandée, confirment «la quasi-totalité des griefs soulevés par le plaignant». Or, le plaignant Ousmane Sonko a écrit dans sa dénonciation d’un détournement de 94 milliards. Il l’a répété à d’autres occasions : meetings, émissions, écrits, etc. Alors pourquoi les enquêteurs parlent de «quasi-totalité des griefs » sans prendre le temps nécessaire d’enquêter afin de prouver l’effectivité du détournement des 94 milliards ? Et pourtant, les banques commerciales, les notaires et les Finances pouvaient, en toute indépendance aider l’OFNAC dans ses investigations pour prouver le détournement s’il était avéré.
POURQUOI L’OFNAC N’A PAS DEMANDE A SONKO D’APPORTER DES CHEQUES ET LES VIREMENTS BANCAIRES ?
Lors d’un meeting en Janvier 2019 à la Place de l’Obélisque, Ousmane SONKO avait déclaré détenir des chèques et des virements bancaires de deux montants dont le total faisait 94 milliards. Pourquoi les enquêteurs ne lui ont pas demandé de produire ces preuves ? Cela allait permettre d’étayer l’accusation de détournement de deniers publics. Mais malheureusement, les enquêteurs de l’OFNAC n’ont pas été à la hauteur de leur mission. Il est inadmissible que ce dossier soit bouclé par l’OFNAC sans que ces preuves ne soient exigées à Sonko. Pour rappel, le leader de PASTEF n’avait pas non plus remis ces supposées preuves à la Commission d’enquête parlementaire de l’Assemblée ni à la Justice qu’il avait saisi. L’on se demande même si ces preuves existent réellement. Evidemment non !
Dans leur conclusion, les enquêteurs écrivent : «toutes ces entorses à la procédure régulière pourraient faire penser à une volonté inavouée des fonctionnaires concernés de tirer le maximum de profit pour SOFICO et CFU dans une seconde procédure d’indemnisation, tout en sachant qu’il y a eu un premier cas d’expropriation ayant abouti à une indemnisation portant sur le montant de 605.853.850 frs CFA ».
L’utilisation du conditionnel dans les conclusions du rapport, prouve que les enquêteurs n’ont pas réussi à établir le délit de détournement de deniers publics comme dénoncé par SONKO. Et, ils n’ont aucune certitude sur ce qu’ils avancent dans la mesure où le dénonciateur n’a produit aucune preuve.
Ensuite, ils poursuivent en écrivant «la volonté inavouée des fonctionnaires concernés de tirer le maximum de profit pour Sofico et CFU ». Cette «volonté inavouée» dont ils parlent a-t-elle réellement abouti à un détournement de 94 milliards ?
Les enquêteurs ont été saisis par Ousmane SONKO pour prouver l’effectivité du détournement de cet argent. Alors, ils ont été incapables d’apporter des preuves de ce supposé détournement. Puisque l’accusateur ne disposait non plus d’aucune preuve. Voilà pourquoi, les auteurs du rapport se sont perdus dans une littérature purement politicienne, exclusivement à charge pour plaire au «frère ».
Par conséquent, le rapport n’a été qu’un support de communication balancé à la veille du dépôt des listes pour les élections législatives, dans le but d’accompagner Ousmane SONKO dans sa campagne politique. Et cela n’honore ni les enquêteurs, ni l’OFNAC.
Toujours dans la conclusion des enquêteurs on peut lire : «Les éléments de fait ci-dessus relatés pourraient permettre de retenir les infractions suivantes ». Encore un conditionnel qui confirme que les enquêteurs évitent d’affirmer un détournement. Et, ils ont opéré un glissement pour viser les délits suivants : «association de malfaiteurs, fait prévu et réprimé par les articles 238 à 240 du Code Pénal ; escroquerie portant sur des deniers publics, fait prévu et réprimé par les articles 152 à 154 du Code Pénal, tentative d’escroquerie portant sur des deniers publics, complicité d’escroquerie portant sur les deniers publics ».
Comme on peut le constater, le délit de détournement est absent des conclusions de l’OFNAC. Et nulle part, il n’a été prouvé des manquants dans les caisses de l’Etat dans ce rapport de l’OFNAC. Face aux accusations fermes d’Ousmane SONKO d’un détournement de 94 milliards, l’OFNAC plus nuancé parle «d’escroquerie et de tentative d’escroquerie». Rappelons que, les délits visés par l’OFNAC s’éloignent totalement des griefs relevés par Ousmane SONKO dans sa plainte. Le leader de Pastef n’a pas parlé d’escroquerie ou de tentative d’escroquerie. Il a dénoncé un détournement de deniers publics. Alors, pourquoi l’OFNAC est muet sur cette question précise ? La réponse coule de source. Ce détournement n’a jamais eu lieu. C’est une infâme invention d’Ousmane SONKO. Voilà pourquoi l’OFNAC a abandonné le débit visé par Monsieur SONKO dans sa plainte pour verser dans des suppositions.
L’OFNAC MUET SUR LES CONVENTIONS ENTRE «AFEX », « ATLAS », « MERCALEX » ET LES FAMILLES
Les Sénégalais ont lu un rapport complaisant rédigé par des enquêteurs paresseux qui n’ont pas voulu investiguer plus loin que le bout de leur nez. Alors que cette affaire cache mal des actes délictuels qui concernent l’auteur de la dénonciation Ousmane SONKO en personne. L’équité, la rigueur et la transparence dans les investigations devraient exiger aux enquêteurs, la réclamation des chèques et des preuves de virements dont le leader de PASTEF dit détenir. Il est évident que la collusion entre certains enquêteurs de l’OFNAC et les acteurs politiques entachent la crédibilité du rapport.
L’OFNAC n’est pas une juridiction. Il ne peut pas se substituer à la Justice. Toutefois, sur la base de ces rapports le parquet peut ouvrir une enquête s’il dispose suffisamment d’éléments de la part de l’OFNAC. Malheureusement, dans le cas des 94 milliards, le travail a été bâclé par des enquêteurs paresseux qui ont publié un rapport à charge et incomplet.
L’OFNAC a fermé ses yeux sur les preuves du rôle d’intermédiaire de SONKO qui cherchait à empocher 12 milliards de francs CFA en violation de la loi sur l’indemnisation en matière d’expropriation foncière. Les sociétés de Tahirou SARR n’ont pas été des intermédiaires. Le sieur SARR a acheté la créance et payé les familles. Comme il le fait partout ailleurs à travers le monde.
En plus, pourquoi les enquêteurs ont dévié leur regard sur l’intérêt caché par le plaignant dans ce dossier alors qu’il était en négociation entre les familles via les sociétés : AFEX, ALTAS et Mercalex impliquant ses associés Ismaïla BA et Abdourahmane BALDE Trésorier adjoint de PASTEF ? Pourquoi les enquêteurs n’ont pas convoqué tous les proches de SONKO impliqués dans cette affaire ? Pourquoi les enquêteurs n’ont pas mis dans le rapport les réponses de Tahirou SARR, de Mamour DIALLO et des membres de la famille ? Pourquoi les enquêteurs n’ont pas exploité les audios confirmant les réunions entre Sonko et les familles ? Pourquoi les enquêteurs n’ont pas exploité les 02 Conventions signées entre les familles et les Cabinets de SONKO ainsi que les courriers adressés à Tahirou SARR par les proches de Sonko pour solliciter une négociation ?
Retenons juste que ce dossier est définitivement clos. Et, la transmission du rapport au procureur de la République sera sans effet. Car l’affaire a déjà été vidée par la Cour d’appel de Dakar. Elle a condamné l’Etat du Sénégal a payé 94 milliards à Tahirou SARR plus dommage et intérêt dans l’arrêté du 29 Juillet 2021.
Mamadou Mouth BANE