COMMENTAIRE – IL N’EST PLUS DIOMAYE… (PAR BACARY DOMINGO MANE)
Il n’est plus Diomaye ou Diakhar. Il n’est plus Sonko. Il est un autre : il est tout simplement le président de la République du Sénégal ! A ses amis d’enfance qui seraient tentés de voir toujours en lui, le jeune garçon qui courait, parfois torse nu, les ruelles de Ndiaganiaw et de se plaindre qu’il ne décroche plus le téléphone ; à ses compagnons d’infortune de Pastef se souvenant des années de galère et voulant faire du Président leur «otage» ; à ses alliés de la coalition Diomaye Président qui estiment qu’avec cette victoire du peuple, qu’ils ont tous les droits sur le nouveau locataire de l’Avenue Roume ; à ses épouses qui ont déjà «volé » son cœur et qui pensent mordicus que le Président Diomaye est leur «chasse gardée» ; aux néo-opposants dans la peau de mauvais perdants qui s’emploieront à désacraliser l’institution ; à tous ceux qui revendiquent une proximité avec le désormais Premier des Sénégalais…Le temps de la désillusion est arrivé.
Vous avez fait de Diomaye Diakhar Faye le président de la République, assumez, à présent, le meurtre symbolique. L’enfant de Ndiaganiaw s’est réincarné en chaque citoyen sénégalais. Nous portons en chacun de nous une partie de son corps sacré. Et comme le disait le Pr Mamoussé Diagne , utilisant une métaphore de Régis Debray, le Président de la République du Sénégal n’est pas quelqu’un qui habite à un numéro déterminé de l’avenue Léopold Senghor, c’est quelqu’un chez qui le Sénégal habite, par la volonté même des Sénégalais. Le caractère sacré du corps du Président incarnant l’Etat, n’a rien de religieux, il se décline en termes de présence. C’est en cela que nous épousons la thèse de Kantorowicz lorsqu’il affirme que l’Etat ne doit pas être appréhendé comme une réalité extérieure aux individus sur les lesquels il exerce sa puissance, mais tout au contraire «il est présent à eux, il fait corps avec eux» .
La réalité du président de la République s’impose à tous. Sa couronne est un objet singulier et son image est sans réplique. Son entrée au palais produira, à coup sûr, des dommages collatéraux, puisque des amitiés seront sacrifiées, des alliances rompues, des serments trahis parce que le pouvoir repose sur deux socles : l’éthique de conviction et l’éthique de responsabilité. Le président de la République est donc dans l’obligation d’arbitrer pour prendre une décision.
Bacary Domingo MANE